Dictionnaire international des militants anarchistes
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VERNET Madeleine [CAVELIER Madeleine, Eugénie, Clémentine, Victorine, épouse TRIBIER dite]
Née le 3 septembre 1878 au Houlme (Seine-Inférieure) - morte le 5 octobre 1949 - Educatrice - LICP - Yvelines
Article mis en ligne le 13 septembre 2012
dernière modification le 12 septembre 2023

par R.D.

En 1888, les parents de Madeleine Vernet s’installèrent à Barentin (Seine-Inférieure) où ils tinrent un petit commerce. Vers 1900, la mère de Madeleine Vernet, devenue veuve, s’installa à Pissy-Povilie (Seine-Inférieure) et prit en charge quatre fillettes de l’Assistance publique. Cet événement révéla à la jeune fille sa vocation d’éducatrice populaire. Elle écrivit une série d’articles sur les « Bureautins » dans la revue Pages libres de Charles Guieysse, pour dénoncer la grande misère des enfants assistés et les abus tolérés par l’Administration d’alors ; en représailles, les pupilles confiées à sa mère lui furent retirées. Madeleine Vernet tenta alors de créer un orphelinat ouvrier géré par les coopératives de la région rouennaise, mais elle échoua et, fin 1904, elle gagna Paris pour tenter de réaliser ses projets. Pour subsister, M. Vernet s’employa comme aide comptable ; en même temps, elle entreprit une série de démarches auprès des syndicats et des coopératives, auprès de journalistes et de députés. C’est alors qu’elle fit la connaissance d’Albert Thomas, de Marcel Sembat, de Georges Yvetot.

Le 1er mai 1906, grâce en partie aux économies de sa mère, et avec l’aide de sa sœur et de son compagnon Louis Tribier qu’elle épousera le 12 octobre 1909, elle put fonder l’orphelinat « l’Avenir social » dans un petit pavillon de Neuilly-Plaisance (Seine-et-Oise). En août, Madeleine Vernet loua un second pavillon, car « l’Avenir social » comptait alors vingt-quatre pensionnaires et comptait par la suite faire fonctionner “une exploitation agricole et de petits ateliers coopératifs où les enfants feraient leur apprentissage” (cf. Les Temps nouveaux, 25 août 1906). En 1907, il y en avait trente : dix-sept garçons et treize filles. L’orphelinat put survivre grâce aux dons d’amis, à l’aide apportée par la coopérative « La Bellevilloise », aux souscriptions de l’Humanité et de la Guerre sociale et à l’édition d’une série de 12 cartes postales représentant chacune une scène de la vie des pupilles (voir site Cartoliste https://cartoliste.ficedl.info/mot1....

L’Avenir Social, Eponne

Madeleine Vernet s’était liée également, dès 1904, avec les milieux libertaires. Elle avait publié une brochure, l’Amour libre (Brochure mensuelle n°30, avril 1925), et un roman, La Torine. Elle collabora au Libertaire et aux Temps nouveaux et, dans ces journaux, s’éleva en particulier contre la doctrine néomalthusienne poussée à l’extrême et qui aboutissait non plus à la limitation des naissances, mais à leur suppression (cf. « Être Mère ! », Le Libertaire, 8-15 septembre 1907). Dans les Temps nouveaux, elle opposa « au Droit à l’Avortement, le Droit à la Maternité » (cf. numéro du 1er avril 1911). Elle écrivit également dans Le Libertaire (1908) de nombreux articles sur l’émancipation des femmes : “La femme a deux libertés à conquérir. Il lui faut, comme l’homme, s’affranchir du patronat. Il lui faut ensuite s’affranchir de l’homme lui-même. La femme, comme l’homme, sera affranchie du patronat lorsque les travailleurs - sans distinction de sexe - seront devenus les maîtres indépendants du travail ; elle sera affranchie de l’autorité masculine le jour où, en face de l’homme libre économiquement, elle se dressera également libre…

Critiquée à l’ouverture de L’Avenir social par certains libertaires sur "l’aspect bourgeois de la propriété", elle répondit et précisait dans Le Libertaire : “J’aime les pages d’unVallés, d’un Kropotkine, d’un Reclus. Ces gens furent, dit on, des anarchistes. Moi je dis : ce furent des hommes, de vrais hommes. Et parce que certains individus s’affublent du titre d’anarchistes, crient très fort, se brouillent avec le savon, négligent leur tenue et déblatèrent contre la société, je ne m’y trompe pas et ne confonds point les seconds avec les premiers… Je le déclare tout de suite et sans ambages : l’éducation que nous donnons ne sera ni libertaire, ni socialiste, ni anarchiste, no même libre-penseuse ! Ce era de l’éducation sans autre titre… Des libertaires m’ayant jugée socialiste, et des socialistes m’ayant trouvée libertaire, je ne sais pas bien moi même bien exxtement quelle étiquette me conviendrait. Et de la sorte je suis quelque chose, peut être bien quelqu’un, ais en tous cas je ne saurais être "tout le monde", puisque "tout le monde" ne me reconnait pas pour être de son clan. Cela me met à l’aise. Je prends aux uns et aux autres ce qu’ils ont de bon, ans avoir besoin de m’affubler d’une livrée” (cf. Le Libertaire, 24 juin 1906).

Le 14 avril 1908, « l’Avenir social » se transporta à Épône (Seine-et-Oise). Là, Madeleine Vernet poursuivit son oeuvre en dépit de l’hostilité de la population cléricale et des tracasseries de l’administration et de l’inspecteur primaire de Mantes.

Le3 mars 1912, lors d’une assemblée générale des adhérents, furent adoptés les statuts de la nouvelle association des Amis de l’Avenir social et avait ratifié la nomination des 10 membres du Conseil d’administration : Pichot (syndicat des services municipaux de la Seine) ; Lestre (syndicat des mécaniciens de Saint-Denis), Pichon (de L’Avenir Social de Saint-Denis), X. (de L’Egalitaire), Vallet (24e section du PS), David (13e section du PS), Picard (des Néo Malthusiens du 3e), Ardissonne (des Pupilles du 3e), Durand et Mme Frenois (individuels).

La guerre obligea M. Vernet à quitter Épône pour « la colonie des enfants de mobilisés » à Etretat (Seine-Inférieure) mais, dès que le front fut stabilisé, elle obtint de revenir à Épône.

Durant toute la guerre, Madeleine Vernet se livra à une active propagande pacifiste. Elle publia des poèmes, recueillit à Épône le fils aîné de Marie et François Mayoux emprisonnés pour propagande antimilitariste, organisa un comité de défense d’Hélène Brion, institutrice, secrétaire du conseil d’administration d’Épône, qui avait été inculpée. Madeleine Vernet diffusa une brochure clandestine, elle publia deux numéros d’une feuille Les Voix qu’on étrangle, destinée à lutter pour la paix. En avril 1918, elle publia encore L’École laïque menacée, et entreprit une tournée de conférences à Lyon, Saint-Étienne, Firminy, Saint-Chamond. À son retour à Épône, elle fut inculpée de propagande défaitiste, mais l’armistice mit fin aux poursuites. En 1916-1917, elle avait collaboré à la revue de Sébastien Faure Ce qu’il faut dire et, en août 1917, avait paru le premier numéro de la Mère éducatrice (Epone, 1917-1919, puis Levalmpos Peret, 1920-1939, ai moins 276 numéros) dont la gérante était Valentine Martini.

Après la guerre, Madeleine Vernet continua son action pacifiste et participa à la création de la « Ligue des femmes contre la guerre ». Elle demeurait alors 39 rue Chaptal à Levallois-Perret où à partir de juillet 1923 elle administra la librairie Au Panthéon de la pensée.

En 1922, les communistes se trouvèrent en majorité au conseil d’administration de l’orphelinat d’Épône ; aussi, en janvier 1923, Madeleine Vernet, qui ne s’était pas ralliée au communisme, dut-elle abandonner ses fonctions de directrice. Le 13 juin 1923, les pupilles d’Épône partirent pour Mitry-Mory (Seine-et-Marne), nouvelle résidence de l’œuvre. Deux ans plus tard, « l’Avenir social » était pris en charge par l’union départementale unitaire de la Seine. Transféré à La Villette-aux-Aulnes (Seine-et-Oise), il devint « L’Orphelinat ouvrier », qui cessa de fonctionner en 1938.

En 1928, Madeleine Vernet était secrétaire générale du Comité international d’action et propagande pour la paix et le désarmement, dont l’organe était la Volonté de paix qu’elle avait fondé en 1927.

Madeleine Vernet poursuivit son action dans La Mère éducatrice (tiré à 1800 exemplaires) et au sein du Foyer qu’elle organisa au centre Quaker de Paris. Elle fonda un journal, La Volonté de Paix, qui parut de juin 1927 à janvier 1936 et qui défendait la politique du désarmement. Le journal fut interdit après le procès du gérant, son compagnon Louis Tribier, accusé de provocation de militaires à la désobéissance. En avril 1935, Madeleine Vernet fut élue au comité directeur de la Ligue internationale des combattants de la Paix (LICP). Elle mourut le 5 octobre 1949 et fut inhumée au cimetière de Barentin (Seine-Inférieure).
Œuvres : Outre les titre déjà cités : - L’Avenir social : cinq années d’expérience éducative [1906-1911], 1911, in-8°, 56 p. (Bibl. Nat. 8° R. 34 876). — Les sans famille duprolétariat organisé et de l’Avenir social (1911) - Une belle conscience et une sombre affaire, brochure clandestine publiée en 1917 et consacrée à Hélène Brion. — L’Amour libre, 1920, 57 p., in-12 (Bibl. Nat. 8° R. 30 136). — Pages contre la guerre, 1921. — Poèmes, contes, etc. (voir le catalogue de la Bibl. Nat.) ; - Berceuse pour le p’tit gars (chanson parue dans le Bulletin de la Ruche, n°4 — Encyclopédie anarchiste, articles : Mère, Orphelinat.
Elle colabora également outre les titres cités à La Revue socialiste (1911) et à La Voix libertaire (entre 1931 et 1937).

Madeleine Vernet (Collage Eric Beaunie, 2020)

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