Dictionnaire international des militants anarchistes
Slogan du site
Descriptif du site
FINET, Marie, Régis [épouse LABOURET]
Née le 3 avril 1858 à Lyon (3e arrondissement)- morte en 1893 Couturière en robes – Lyon (Rhône)
Article mis en ligne le 24 mai 2018
dernière modification le 7 mars 2024

par Dominique Petit, Marianne Enckell, R.D.

Son père Jean-Baptiste Joseph Finet était graveur sur bois et demeurait 141 rue Duguesclin. Il perdit sa femme Louise Gardet le 13 juin 1876.

Marie Finet habita avec son père jusqu’à son mariage le 29 octobre 1878, avec Victor René Labouret, typographe, né à Reims (Marne) le 18 mars 1848 : le journaliste Félix Dubois (Le péril anarchiste, p. 86) décrira leur couple : « femme intelligente et active d’un typographe aussi acharné socialiste qu’elle était enragée anarchiste. Ils allaient chacun de leur côté dans les réunions et ne craignaient pas de se combattre publiquement (par la parole) – vivant au reste en bonne harmonie ».

Le 1er Congrès ouvrier qui s’était tenu à Paris décida que chaque année, un congrès aurait lieu dans une des villes les plus importantes de France et Lyon fut désigné pour le 2e congrès, dont la date fut fixée au 2 octobre 1877.
Dès le 15 novembre 1876, une commission provisoire d’organisation, composée des délégués lyonnais au Congrès de Paris s’était formée à Lyon. Elle fut remplacée le 11 mars 1877 par une commission exécutive centrale de 19 membres.
Marie Finet fut déléguée par la corporation des couturières, modistes et lingères à cette Commission exécutive d’organisation dont elle devint secrétaire.
Après le 16 mai, cette commission cessa de se réunir ouvertement et le 29 juillet le préfet du Rhône prononça la dissolution de tous les syndicats ouvriers de Lyon. Dès lors la commission cessa de se réunir et lança un manifeste dans les journaux pour faire connaître sa position. La commission profita de l’ouverture de la période électorale pour se réunir quotidiennement en dissimulant le motif réel de ses travaux et lança un appel aux travailleurs et aux membres des sociétés ouvrières de France, avec le programme du congrès, dont le premier point portait sur le travail des femmes. Marie Finet fut signataire de l’appel avec Victor Labouret et d’autres membres de la Commission.
Les adhésions et demandes de prises de parole pour le Congrès devaient lui être adressée 141 rue Duguesclin.

Le 7 janvier 1878, la Chambre syndicale des dames réunissait ses nombreuses corporations et chacune (33 séries de 20 membres) désigna ses déléguées pour le Congrès ouvrier de Lyon.
Marie Finet fut élue par les couturières en robes.
Le 27 janvier 1878, elle recevait des lettres de Paris annonçant la venue de Joséphine André, ex-déléguée du Congrès de Paris et de Chabert.
A cause de ces retards le Congrès ne put se tenir que le 28 janvier 1878 avec 95 délégués.
Dès la première séance, le 28 janvier, devant un public de 1000 personnes (dont 600 femmes), Marie Finet fut nommée secrétaire et fit un « discours très émouvant et très applaudi », elle « obtint un succès d’élégance. Distinguée, modeste, elle lit un mémoire qui produit une profonde impression » selon la Lanterne. Intervenant sur la question du travail des femmes, elle interrogea : « La femme doit-elle travailler ? Oui, même sans nécessité absolue ; elle doit travailler pour être indépendante, pour être libre, pour être l’égale de l’homme.
La femme est un être inférieur à l’homme, disent les savants ; ses facultés physiques et morales sont au-dessous de celles de l’homme.
Et pour quoi ? s’il vous plaît ? N’est-ce pas la société qui l’a faite ainsi ? Faible, au lieu de l’élever, on la met en tutelle, on lui parle en maître, on en fait une idole ou une esclave, la loi elle-même la met en parallèle avec les fous dans cet article qui dit : Ne pourront être tuteurs, les faillis, les condamnés, les fous et les femmes.
Est-ce ainsi qu’on fera la femme capable d’être la véritable éducatrice des enfants qui deviennent des hommes ?
La femme ne pourra-t-elle pas prendre place au télégraphe, à la banque, à la poste, etc. ? Il ne faut pas que les hommes s’emparent des fonctions que la femme peut remplir. »
Elle exposa « la condition malheureuse des dévideuses de soie, mal nourries, accablées de travail et que le dimanche on mène aux offices religieux pour compléter leur abrutissement. Dans quelques uns de ces ateliers de dévidage, les patronnes, s’abritant derrière une dévotion menteuse, ne craignent pas de livrer leurs ouvrières aux commis et aux négociants qui les emploient
 ».
Elle déplora « les croyances, les pratiques religieuses imposées à l’enfant qui volent son temps, sa santé et son intelligence ».
En conclusion Marie Finet demanda un pétitionnement de toutes les ouvrières de France pour la suppression du travail dans les couvents et les prisons.

Victor Labouret s’opposa à elle dans ce Congrès, pour lui la femme ne devait pas travailler au dehors, elle était faite pour les soins du ménage ; « son état de grossesse, ses indispositions périodiques, etc. tout exige qu’il en soit ainsi ». Il s’étendit plus particulièrement sur l’introduction des femmes dans les imprimeries. Il infligea un blâme sévère aux patrons qui prêchaient pour cette introduction, parce qu’ils réduisaient de moitié le salaire des femmes.

Marie Finet donna également lecture dans ce Congrès d’un rapport sur les caisses de retraite et les invalides au travail.

Le Congrès de Lyon décida de l’organisation à Paris d’un congrès ouvrier international en septembre 1878, à l’occasion de l’Exposition universelle.
Marie Finet était en correspondance avec le comité d’organisation à Paris et déclara, le 17 août 1878, que « rien n’était encore décidé, que la division régnait dans la Commission, que la Congrès se se réunirait probablement pas ». Elle-même souhaitait l’annulation du Congrès international.
Elle prit position contre l’envoi de délégués au Congrès, lors de la commission exécutive de la Chambre syndicale des employés de commerce le 26 août.

Le Comité d’organisation parisien bravant l’interdit de la loi de 1872 sur l’interdiction de l’Internationale, persista à préparer, la réunion à Paris du congrès international, décidé à Lyon. Mais les organisateurs furent arrêtés et passèrent en procès le 24 octobre.

Le 25 août 1878, Marie Finet se rendit à l’Arbresle (Rhône) avec Victor Labouret pour assister à une réunion ayant pour but l’organisation d’une chambre syndicale de dames.
Le 12 décembre 1878, Marie Labouret-Finet était avec son mari à Saint-Étienne devant 136 femmes pour les appeler à créer une chambre syndicale féminine. Elle dénonça les jésuites, les cléricaux, « la confession, ce trouble du ménage ».

A l’occasion d’une crise industrielle dans la soierie lyonnaise se forma au début de l’année 1879, une Chambre syndicale des Dames réunies dont Marie Labouret-Finet était la présidente.
Au mois d’août 1879, la discorde apparut au sein de la Chambre syndicale des Dames réunies, Marie Labouret- Finet fut révoquée avec Léonie Pallet, Roulet et Quinet par 75 adhérentes. Cette exclusion semblait motivée par l’attitude de Victor Labouret, typographe « aux gages » du journal la Décentralisation, où il travaillait. Labouret demanda la formation d’un jury d’honneur sur cette affaire dont on ne connaît ni la motivation réelle, ni le dénouement. Selon une note du commissaire spécial Perraudin, elle avait été renvoyée de la présidence des Dames réunies « parce qu’elle exploitait les membres de la société ».
Mais à partir de cet épisode les chemins de Marie Labouret-Finet et des Dames réunies se séparèrent.

En 1881 elle était à Lyon membre du Groupe de femmes Louise Michel adhérant à la Fédération révolutionnaire de l’est. L’année suivante le groupe prit le nom de Groupe Marie Ferré, elle en était l’une des animatrices (secrétaire à l’été 1882) avec Fanny Madignier.

Le 3 juillet 1882 elle présida la conférence de Louise Michel, E. Digeon et G. Rouanet sur « La Révolution sociale » qui réunit environ 800 personnes à la salle de la Perle et était placée sous la présidence d’honneur de Bordat et de Fournier. Elle était assistée de Crestin et des femmes Bordat, Jenny Julliard et Madignier et l’estrade avait été décorée de deux drapeaux rouges et d’un drapeau noir. A la fin de la conférence, saluée par les cris de « Vive la révolution ! Vive la commune ! Mort aux voleurs ! Vive Bordat !… », le groupe Marie Ferré remit à Louise Michel une couronne d’immortelles rouges à déposer sur la tombe de Marie Ferré.

Le 6 août 1882, Marie Labouret-Finet fit publier dans l’Etendard révolutionnaire un appel pour la création d’une Ligue internationale des femmes, « contre les éventualités de guerres favorables aux ennemis de la liberté des peuples ». Elle y déclarait que Louise Michel et le groupe de femmes anarchistes Marie Ferré de Lyon, se tenaient à la disposition de toutes les citoyennes voulant s’organiser ou faire partie individuellement de la Ligue internationale. Les demandes pouvaient être adressées chez elle, 45 rue Bugeaud.

Cette Ligue fit long feu et le nom de Marie Labouret-Finet n’apparut plus aux côtés de celui du groupe Marie Ferré-Louise Michel, mais le caractère collectif de ses prises de positions publiques peut expliquer cette disparition.

Marquant probablement un éloignement de la sphère anarchiste, le 20 décembre 1884, elle adressa un courrier à la Revue socialiste, pour féliciter les fondateurs, au nom des femmes socialistes lyonnaises.

En juin 1885, elle ouvrit un bureau de la Ligue française pour le relèvement de la moralité publique, « afin de recueillir les plaintes et protestations de toutes les personnes victimes de procédés quelconques contre la morale ».

Madame Labouret décéda en 1893.


Dans la même rubrique

FIGUERAS, Stanislas, Pierre
le 3 mars 2024
par R.D.
FILINI, Battista
le 2 octobre 2023
par R.D.
FINSTER (père)
le 11 août 2023
par R.D.
FICHTER, Joseph
le 19 juillet 2023
par R.D.
FILIPPI, Bruno
le 21 avril 2020
par R.D.