Dictionnaire international des militants anarchistes
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ANGIOLILLO, Michele “Emilio RINALDI”
Né à Foggia le 5 juin 1871 - garroté le 19 août 1897 - Typographe – Foggia – Marseille - Londres - Paris
Article mis en ligne le 30 septembre 2007
dernière modification le 25 février 2024

par R.D.
Michele Angiolillo

Michele Angiolillo avait commencé à militer à Foggia dans un cercle républicain dont il était le secrétaire. Lors de son service militaire, suite à sa participation à des réunions, il avait été envoyé 2 ans dans une compagnie disciplinaire. Ouvrier typographe il était condamné en avril 1895 à Lucera à 18 mois de prison pour “propagande subversive”. Il se réfugia alors en France, d’abord à Marseille avant d’aller à Barcelone sous le nom de José Santos puis de revenir à Marseille. Au printemps 1896 il figurait sur un État signalétique confidentiel des anarchistes étrangers non expulsés résidant hors de France et dont le domicile était inconnu.

Expulsé de France par arrêté du 26 octobre 1896, après avoir été arrêté à Marseille le 14 septembre précédent (cf. Les Temps nouveaux, 3 octobre 1896), il allait en Belgique à Bruxelles où il travailla dans une imprimerie, puis, menacé d’expulsion, en Angleterre où à Londres il militait au Club anarchiste juif et aurait rencontré R. Rocker et de nouveau en Espagne où il travailla dans une imprimerie de Barcelone (imprimerie populaire de la calle Santa Margarita) semble-t-il sous le nom de Joseph Santo. Selon un avis de recherche daté du 2 mars 1896, qui le qualifiait de “très dangereux”, il aurait, à cette époque, quitté Barcelone pour se rendre à Nice. En mai 1896 il avait été inscrit sur un deuxième État nominatif des anarchistes ou des individus considérés comme dangereux, résidant ou voyageant en Espagne.

En 1897 –où semble-t-il, il était en Angleterre - une vague de répression s’exerçait en Espagne et les tortures infligées à Montjuich aux compagnons emprisonnés, puis l’exécution le 4 mai des compagnons Ascheri, Nogués, Mas, Molas et Alsina et la brochure de Tarrida del Marmol Les Inquisiteurs en Espagne, le décidait alors d’aller tuer le responsable de ces tortures : le premier ministre espagnol.
Après être passé par la Belgique et la France - où le compagnon Antignac l’avait rencontré à Bordeaux : " Après un premier entretien nous fûmes une paire d’amis. La douceur, la candeur et aussi l’énergie morale de e jeune homme nous frappèrent vivement […] De taille moyenne, un peu courbé, les dents d’une très saine blancheur, la barbe recommençant à pousser, le nez supportant une paire de lunettes, il donnait, quand il écoutait un camarade, l’impression de la force alliée à une intense limpidité […] Le livre qu’il lisait et relisait était intitulé "Montjuich" par Tarrida del Marmol, sa valise ne contenait que celui là […] Quelques heures avant son départ, nous dîmes à Angiolillo "Au revoir camarade !" "Non pas au revoir, adieu !" A ce moment son œil flamba, sous les lunettes” (cf. Le Libertaire, 29 janvier 1905) - il passait en Espagne et le 8 août 1897, à Santa Agueda (Guipuzcoa) il assassinait le premier ministre Canovas del Castillo. Il se laissait arrêter et revendiquait son action comme un acte de justice. Il était entré en Espagne sous le nom d’Emilio Rinaldi (ou Rimualdini), correspondant du journal Il Popolo.

Devant le tribunal militaire de Vergara, il avait déclaré : "…Je n’ai pas de complices. En vain vous chercherez un être au monde qui ait été mis au fait de mes intentions : je n’en avais parlé à âme qui vive. Seul, tout seul, j’ai résolu, préparé et accompli l’exécution de Canovas del Castillo. Ce n’est pas un meurtrier que vous avez devant vous, mais l’instrument de l’inévitable justice. […] J’ai rencontré sur la route de la révolte beaucoup d’hommes énergiquement dévoués à la cause de la justice, aspirant au bonheur et à l’harmonie sociales. Ce sont des anarchistes : j’ai sympathisé avec eux et les ai aimés comme des frères. Ce qui l’a forcé à me lever, c’est le cri venant de Montjuich, ce cri que tout le monde entendit […] Alors messieurs, je me suis dit que ces choses ne pouvaient pas rester impunies. J’ai cherché les responsables […] Je vis que quelqu’un avait ordonné tout cela. Je ressentis une haine insurmontable contre ce politicien qui avait fait du meurtre et de la mutilation une méthode de gouvernement […] C’est ma fierté et mon bonheur d’avoir nettoyé le monde de Canovas del Castillo, un tigre dont les griffes déchiraient des poitrines humaines, et dont les mâchoires broyaient des têtes." Il avait ajouté qu’en frappant Canovas, il avait voulu atteindre le monstre qui avait rétabli l’inquisition et qui, aux Philippines et à Cuba, s’était rendu exécrable par son despotisme.

Condamné à mort Michelle Angiolillo a été exécuté au garrot le 19 août 1897 aux cris de “Germinal !”.

Peu avant son passage à l’acte, Angiolillo avait écrit, semble-t-il au compagnon Girault, les lignes suivantes : " Chers camarades, faudrait il que je sois ingrat de votre accueil de ta compagne et de toi pour ne pas vous écrire ce matin, alors que je vais peut-être m’éloigner de vous pour longtemps […] J’ai pensé et je pense toujours à ceux dont vous me causiez lors de ma dernière visite […] L’infamie de quelques uns n’a pas de limites et la délivrance des martyrs qui gémissent au fond de toutes les bastilles modernes, ne sera due qu’à l’énergie violente de quelques révoltés […] Un signal de vengeance consciente pourrait peut être briser bien des chaînes car la bourgeoisie est lâche et peureuse dans ses répressions, et des sacrifices forts et puissants dans leur mépris de la vie, pourraient mettre fin à un état de chose intolérable. C’est là il me semble, cher ami, qu’est le salut […] Que les uns soient des faibles et les autres des égoïstes, cela ne détruit pas l’ardeur de la générosité individuelle des mystérieux qui surgissent parfois aussi vite que l’ouragan qui surprend. Mes lignes seront peut être un peu incompréhensibles pour toi lorsque tu les liras, mais j’espère, d’ici peu, t’en donner une plus matérielle explication…" Girault fit la lecture de cette lettre lors d’une réunion publique tenue en septembre 1897 à la Maison du peuple, rue Ramey.

Suite à l’exécution d’Algiolillo, Les Temps nouveaux ouvrirent une souscription en faveur de sa famille mise à l’index par les autorités à Foggia où son père Giacomo avait perdu son emploi de tailleur d’habits.

Dans un billet signé R.D., intitulé "Le Cycle expiatoire" et publié dans Le Libertaire (27 août 1897), il était écrit : “Sang pour sang…, Par la mise à mort du ministre Canovas, Michel Angiolillo a fait acte de révolte et de beauté. Une leçon s’en dégage : que les détenteurs d’autorité comprendront peut être : c’est que les temps sont loin de l’universel agenouillement et proches ceux où les Pauvres, las des demandes inexaucées, surgiront pour l’action et pour consommer la chute des derniers des Maîtres. Le meurtre de Canovas ; après le meurtre de Carnot, inaugure un cycle : celui de la révolte directe pour les humbles et de l’expiation pour les puissants. Et nous, à la veille d’aller dans la vie et dans le peuple, nous saluons ce cycle de l’anarchique cri de guerre Terre et liberté !”.


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