Dictionnaire international des militants anarchistes
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TRICHEUX, Alphonse, Jean
Né le 22 janvier 1880 à Lézignan (Aude) – mort le 6 octobre 1957 - Tourneur sur métaux - UA - UACR – FA – CGTSR – Toulouse (Haute-Garonne) - Puigcerda (Catalogne)
Article mis en ligne le 10 avril 2010
dernière modification le 20 septembre 2023

par R.D.
Alphonse Tricheux (1936)

Fils d’un mécanicien aux chemins de fer militant anarcho-syndicaliste (Eugène), Alphonse Tricheux, orphelin de bonne heure et élevé par sa grand-mère, apprit très vite le métier de tourneur sur métaux. A l’automne 1901 il se mariait avec Pauline Fabre dont il aura trois garçons : Eugène, Marius et Noël qui ne survivra pas.

En 1905 la famille émigrait à Cuba, où l’année suivante naissait à La Havane leur fille Noela, et où elle allait rester jusqu’en 1919 où elle regagnait Toulouse.

Dès son arrivée à Toulouse Alphonse commença à travailler dans une petite coopérative fabriquant des ustensiles en métal galvanisé et avec sa famille adhéra au Groupe d’études sociales formé de militants français et espagnols. Dès 1924 le groupe, dont Alphonse était devenu le secrétaire, se réunissait au domicile des Tricheux. Puis le groupe dont furent notamment membres ses enfants, Alexandre Mirande, V. Nan, M. Llaty, Abrial, Lion, Teule, Galy et Membrado, changea son nom en celui de Bien-être et Liberté.

Lors des élections législatives de mai 1924, il fut, avec Serre, Brunel, Bernard, Nombrail et Pradal, l’un des candidats abstentionnistes d’une liste libertaire qui, profitant de la campagne, avait essentiellement pour but de mener une action antimilitariste de dénoncer la répression tant en France que dans les colonies et d’appeler « à la libération des 100.000 détenus des bagnes militaires et civils » et notamment d’Émile Cottin, Jeanne Morand et Gaston Rolland.
Cettre même année 1924, il participa très activement au Comité Pro-Justicia qui mena campagne en faveur du militant espagnol Juan Bautista Asher condamné à mort en Espagne.

En décembre 1924, Alphonse Tricheux était à l’origine avec Bernard, Lion et Alquier de la création d’un syndicat autonome des métaux qui ultérieurement adhèrera à la CGTSR.

Les 15-16 août 1925, il fut délégué de Toulouse au congrès de la Fédération révolutionnaire du Languedoc, organisation qui avait été fondée à Béziers le 29 octobre 1924 ; il devint l’un des principaux dirigeants de la Fédération anarchiste du Midi et collabora au Libertaire, journal de l’Union anarchiste.
Pour avoir publié des articles contre la guerre du Maroc et après avoir été arrêté en juin 1925 alors qu’il distribuait des tracts contre cette guerre, Alphonse Tricheux, qui était inscrit au Carnet B depuis 1924, fut condamné le 15 janvier 1926 à huit mois de prison par le tribunal correctionnel de Toulouse sous l’inculpation de « provocation de militaires à la désobéissance ». Incarcére en mars il ne fut libéré de la prison Saint-Michel que le 3 décembre après avoir effectué l’intégralité de sa peine.
Le 27 novembre 1926, lors du congrès de constitution de la Fédération du midi de l’UAC à Toulouse, il avait été nommé secrétaire aux cotés de Mirande (secrétaire adjoint) et de Nan (trésorier). Etaint représentés à ce congrès les groupes de Toulouse, Narbonne, Coursan, Béziers, Montpellier, Nîmes, Carmeaux, Albi, Aimargues et Bessan.

Puis il participa activement en 1926-27 aux manifestations de soutien à Sacco et Vanzetti.

Lors des élections législatives de 1928 et de 1932, Alphonse Tricheux fut une nouvelle fois candidat abstentionniste aux cotés de V. Nan et de Louis Boué.

Alphonse Tricheux et son âne

Alphonse Tricheux fut aussi l’un des dirigeants de la CGT-SR. Il assista au congrès de l’Union anarchiste communiste révolutionnaire (UACR) qui eut lieu à Paris les 19, 20 et 21 avril 1930 et fonda à Toulouse, en octobre, le Comité des réfractaires à toute guerre. Il fut dans cette ville l’un des organisateurs du congrès de l’UACR qui eut lieu les 17 et 18 octobre 1931. L’année suivante, en juin, il assista à Angers au premier congrès de la Ligue internationale des combattants de la paix (LICP).

En mai 1929 il fit l’un des animateurs de la coopérative ouvrière d’alimentation L’Avenir fondée par le Groupe anarchiste qui, chaque semaine, vendait à ses adhérents diverses denrées alimentaires (haricots, pois, huile, pâtes, etc) achetées en gros.

Alphonse Tricheux

Au début des années 1930, avec sa compagne Paule il adopta et éleva Georges Balkov, le fils des militants bulgares Dimitar Balkov et N. Popova qui venaient de mourir. En 1932 il servait de boite aux lettres au Comité de relations de la Fédération des groupes anarchistes espagnols en France qui avait été reconstitué à Touolouse au mois de mai.

Il fut l’un des dirigeants du Comité de relations de la Fédération anarchiste du Midi constitué en juin 1933 à l’issue du congrès tenu à Coursan (Aude).

En mai 1936, il fut délégué par la CGTSR au congrès de la CNT espagnole à Saragosse dont il fit le compte rendu dans Le Libertaire et, dès juillet 1936, partit avec sa compagne et leurs enfants pour l’Espagne où il s’engagea dans les colonnes anarchistes. Installé à Puigcerda qui était gérée par un Comité révolutionnaire essentiellement de la CNT-FAI, Alphonse collabora alors aux pages françaises de l’organe local Sembrador. Début 1937, avec 10 aitres militants français - dont son fils Eugène, les frères Roger et Raymond Pantais, René Prince, Montgon et Marcel Schlauder - il fut suspecté"par la police française d’avoir été mêlé au vol d’armes (13 mitrailleuses, 13 mousquetons et des revolvers) commis dans la nuit du 5 au 6 février à l’école de cavalerie de Saumur (Maine-et-Loire) dont certaines seront retrouvées lors de perquisitions au siège du Comité Espagne libre de Paris. En juin 1937, suite aux affronetments du mois précédent avec les staliniens, il fut arrêté et emprisonné à Puigcerda par des éléments communistes. A sa libération au bout de quelques jours, il rejoignit Toulouse, tandis que sa compagne et leur fille étaient retenues à Puigcerda.

Famille Tricheux et le groupe (sortie champêtre à Pech David, 1935 ou 1936)

Lors de la retirada et de l’acceuil fait en France aux milliers de réfugiés espagnols parqués dans des camps, il écrivait dans un article intitulé « On nous fait faire lâcheté sur lâcheté » : « …Ainsi c’était cela cette République amie, cette démocratie de laquelle ils attendaient tout, qui volerait à leur secours, qui comprendrait, qui agirait ? Honte à toi, peuple de France qui n’a pas compris ton devoir ! Que deviens-tu « berceau des révolutions » ? Cache-toi, ensevelis-toi dans ta honte ; rentre dans ton tombeau car tu trahis ton passé. Les révoltés du monde quand il sétaient traqués cherchaient naguère chez toi un refuge, c’est dans les prison aujourd’hui que tu les héberges… Le moindre souffle de la Révolution passant en n’importe quelle partie du globe trouvait en toi, France, un défenseur ; maintenant c’est du coté des oppresseurs que tu te ranges… Je rougis d’être Français ! ». Analysant la situation il ajoutait : « … Ah je sais : à tout prix éviter la guerre, ne rien faire qui puisse servir de motif de guerre. Résultat : l’Espagne écrasée, l’esprit de liberté en recul, l’extermination des meilleurs révolutionnaires, l’établissement du fascisme dans la péninsule ibérique sous la tutelle des Mussolini et des Hitler ; de telle façon que cette guerre dont on aura dit que l’on voulait tout faire pour l’éviter, on l’aura rendue inévitable ; car, que l’on ne s’y trompe pas, il faudra après la victoire de Franco « donner à gagner » aux magnats du béton, des plaques blindées et des gros canons… » (cf. SIA, 26 janvier 1939)

Figurant comme toute sa famille sur une liste d’individus dangereux établie par les Renseignements généraux, Alphonse Tricheux, contrairement à ses fils Marius et Eugène, ne fut pas interné administrativement par les autorités de Vichy et, en raison de son âge ne fut pas réquisitionné au titre du STO. Lors des visites de Pétain à Toulouse, la police se contentait de le confiner au commissariat des Remparts.

Pendant l’Occupation, la fermette des Tricheux, aux portes de Toulouse, servit de lieu de contact et de rencontres aux illégaux de toutes nuances. Le 19 juillet 1943 s’y tint un « congrès » anarchiste auquel participèrent une vingtaine de personnes dont, outre le couple Tricheux, Maurice Laisant, André Arru, François Deluret, Voline, San Clemente et José Ester Borras de la CNT-FAI, congrès tenu en vue de redonner vie à la Fédération anarchiste.

Après la Libération, Alphonse Tricheux, qui en janvier 1946 avait été remplacé par R. Clavé au secrétariat du groupe Bien être et liberté reconstitué à la Libération, milita à la Fédération anarchiste jusqu’à sa mort survenue le 6 octobre 1957 à Toulouse.


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