Dictionnaire international des militants anarchistes
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BORIASSE, Henri
Né le 29 octobre 1834 à Caluire (Rhône) - Chauffeur-imprimeur sur étoffes ; marchand de lingerie ; courtier en librairie - AIT – Lyon (Rhône) - Suisse
Article mis en ligne le 30 septembre 2013
dernière modification le 7 septembre 2023

par ps

Sans doute Henri Boriasse, qui avait été condamné le 12 décembre 1854 à 15 jours de prison pour "bris de clôture", marié, père de quatre enfants, appartint-il à l’Internationale avant la Commune. Toujours est-il qu’il fut le principal fondateur de la section « antiautoritaire » de la Croix-Rousse clandestinement reconstituée fin 1872 après le congrès de La Haye qui avait marqué la rupture entre marxistes et bakouninistes. Cette section comprenait notamment Bruy, Deville, Laurençon, Perroncel et Roussel. Boriasse était chargé, ainsi que Perroncel, de la correspondance et assurait la liaison avec la section de la Guillotière dirigée par Audouard. Les deux sections se bornèrent avant tout à répandre des brochures de propagande antimilitariste et antireligieuse, Boriasse faisant la contrebande des livres prohibés entre la Suisse et la France.

Boriasse représenta Lyon au congrès régional de Saint-Étienne organisé par Gillet le 8 juin 1873, participa à celui de Lyon le 15 août, puis assista au 6e Congrès de l’Internationale, congrès « antiautoritaire » tenu à Genève du 1er au 6 septembre suivant. Par prudence, il ne figura toutefois pas au titre de délégué, et ce fut Pindy qui représenta Saint-Étienne et Lyon à ces assises. Le 31 août, Boriasse s’était chargé de faire passer secrètement la frontière à P. Brousse qui, venant de Barcelone, se rendait à Genève. À partir d’octobre 1873, Boriasse fut supplanté à Lyon par C. Camet.

Arrêté en décembre 1873, il comparut devant le tribunal correctionnel de Lyon et fut condamné, le 25 avril 1874, à trois ans de prison, 50 F d’amende et cinq ans de privation de ses droits civiques (affaire du Complot de Lyon).
Après avoir purgé sa peine, Boriasse reprit son activité militante.

En mars 1881, il prit part, aux côtés de Toussaint Bordat et de Bernard, à la formation de la fédération révolutionnaire de la région de l’Est, née de la scission opérée dans les rangs de la fédération de l’Est fondée en novembre 1880 en application d’une décision du congrès national ouvrier tenu à Marseille le 20 octobre 1879. Ainsi donc les anarchistes lyonnais se séparaient du Parti ouvrier avant même que le congrès régional de la région du Centre, réuni à Paris le 22 mai 1881, eût consacré la rupture entre socialistes et anarchistes. Fin 1880 Boriasse avait été écarté de la délégation au congrès socialiste du Havre en raison de sa liaison avec le Parti Socialiste Abstentionniste (qui en 1881 deviendra le groupe Le Drapeau Rouge).

À la fédération révolutionnaire, il s’opposa à P. Bernard et T. Bordat à qui il reprochait de vouloir diriger le « Parti » de l’extérieur, sans la participation des huit sections de quartier où se groupaient les militants lyonnais. Le 5 octobre 1881, au cours d’une réunion restreinte de la fédération, il demanda l’autonomie des sections et proposa de confier la direction de la fédération à une commission formée de délégués investis par les sections. Le 10 octobre, lors d’une réunion de la section des Brotteaux dont il était membre, il renouvela ses demandes et reprit ses critiques contre Bernard et Bordat. À partir de cette date les réunions de sections furent plus fréquentes, et plus rares celles de la fédération.

Le 15 octobre 1881, à la salle de l’Elysée du quartier de la Guillotière, “décorée de douze drapeaux rouges et d’un drapeau noir avec franges blanches”, il participa, avec entre autres Bordat, Hugonnard, Joseph Bernard, à la réunion déclarée à caractère privée, tenue par la Fédération sur la question tunisienne.

Le 25 octobre, lors d’une réunion de la section des Brotteaux, il fut remplacé au secrétariat par Faure et fut nommé avec Dupuis à la commission de correspondance, des finances et de réorganisation des sections. Il demeurait alors 59 rue Montgolfier.

Boriasse fut l’un des douze compagnons lyonnais délégués de la fédération révolutionnaire à une réunion anarchiste de caractère international qui se tint à Genève les 13 et 14 août 1882 sur l’initiative d’Élisée Reclus de la Fédération jurassienne (Voir Toussaint Bordat et Herzig). Il y avait également un mandat du groupe de Roanne.

A l’automne 1882 il était également membre de la Ligue pour les intérêts populaires qui regroupait blanquistes et anarchistes et était animée notamment par Thomassot.

Après les violentes manifestations de Montceau-les-Mines d’août 1882 et les attentats à la bombe perpétrés à Lyon en octobre, la police procéda dans les milieux anarchistes à de nombreuses arrestations ; un meeting de protestation, organisé par Boriasse, salle de l’Élysée à Lyon, le 18 novembre, réunit 500 personnes. Le lendemain la police reprit ses poursuites ; Boriasse et quelques-uns de ses compagnons eurent juste le temps de se réfugier en Suisse. Selon le rapport d’un indicateur, Boriasse affublé d’une fausse barbe et muni des papiers de son frère, serait arrivé à Genève le 27 novembre “après avoir fait au mois vingt kilomètres à pied dans la montagne”.

Impliqué dans le procès, dit « Procès des 66 », qui s’ouvrit à Lyon devant le tribunal correctionnel, le 8 janvier 1883, Boriasse, qui demeurait 38 rue Mongolfier, fut rangé dans la deuxième catégorie des prévenus (voir T. Bordat). Il fut condamné par défaut, le 19 janvier 1883, à cinq ans de prison, 2 000 f. d’amende et dix ans de surveillance et de privation des droits civiques, civils et de famille.

Peu après, en juillet 1883, Boriasse, qui résidait alors à Genève, fut expulsé du canton pour n’avoir pas de papiers en règle et se rendit probablement dans le canton de Vaud.

À son retour de Suisse, au début de l’année 1890, il fit partie du groupe de la Guillotière et des Brotteaux, le plus important des groupes anarchistes lyonnais. Le 16 juin 1890 il présidait à Lyon un meeting en faveur des emprisonnés suite à la manifestation du 1er mai et auquel participèrent quelques 300 personnes ; il y était assisté à la tribune par le cordonnier Claude Mazoyer et le socialiste révolutionnaire Paul Bernard. Ce groupe changea de nom sur l’initiative de Sébastien Faure pour s’appeler, en février 1892, les Ennemis de toute candidature. La qualité de ses membres en fit le pôle d’attraction des militants lyonnais. Directives, décisions, action de propagande partaient de lui. Il fut, pendant quatre années, de 1890 à 1894, l’âme de l’anarchisme lyonnais.

H. Boriasse fut arrêté préventivement à la veille du 1er mai 1892 avec 37 de ses compagnons sous l’inculpation d’association de malfaiteurs contre les personnes et les propriétés. Quelques jours après, le 3 mai, il fut remis en liberté. Il demeurait alors 21 rue Garibaldi.

Le 23 mai 1894, pour un discours prononcé le 21 avril, salle Laroche à Lyon, il fut poursuivi avec le compagnon Hippolyte Ramé pour "apologie des crimes de meurtre, pillage et incendie" et fut condamné à six mois de prison, tandis que Ramé était condamné à 5 mois. Lors de cette réunion et à propos d’E. Henry, dont il rappela que le père, communard, avait été condamné par les Versaillais, il avait notamment déclaré : “C’est pour cela que mon ami Henry, ce généreux enfant, a voulu revendiquer ses droits. C’était pour vous venger, abrutis, pour revendiquer votre liberté. Un anarchiste condamné, il en renaît un mille. C’est que l’anarchiste a du courage. Hourra pour la révolution sociale !”. Selon un rapport de police à l’occasion de ce procès, Boriasse manifestait “une certaine douceur de caractère, mais ses tendances politiques le rendent dangereux”. Toutefois le commissaire ajoutait que “sa moralité était mauvaise” ayant abandonné sa femme et vivant “depuis plusieurs années avec une concubine”.

En 1897 il figurait sur une liste d’anarchistes de Lyon où il demeurait alors 12 rue Inkermarn.

En 1911, un rapport de police signalait son rôle dans les milieux socialistes révolutionnaires de la Croix-Rousse et le présentait comme un défenseur des thèses antiparlementaires de Gustave Hervé.


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