Dictionnaire international des militants anarchistes
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Y’en a pas un sur cent… et pourtant des milliers d’hommes et de femmes de par le monde, souvent persécutés, embastillés, goulagisés et parfois au prix de leurs vies, ont poursuivi leur chevauchée anonyme à la recherche d’un impossible rêve : un monde sans dieux ni maîtres.

BINTZ, Victor

Né vers 1889 — Plombier — CGT — Paris
Article mis en ligne le 29 avril 2018
dernière modification le 12 juillet 2024

par Guillaume Davranche, R.D.

En 1912-1913, l’affaire Bintz fit des remous à l’extrême gauche.

Victor Bintz, était un jeune plombier syndicaliste révolutionnaire « bien connu des services de police ». Il avait été arrêté à Paris pour une « chasses aux renards » en août 1910 et condamné, le 13 septembre, à six semaines de prison et 16 francs d’amende.
Sa peine n’était pas achevée lorsque, en octobre 1911, il fut appelé au service militaire. Il fut incorporé au 3e escadron du train à Vernon (Eure), où il fut victime du harcèlement de l’officier Rognoni. En décembre 1911, il fut traduit en conseil de guerre, et condamné aux compagnies disciplinaires.

Un de ses compagnons de chambrée, l’anarchiste Jean Lacotte, envoya des articles signés « le jeune major » à La Bataille syndicaliste et à La Guerre sociale pour dénoncer la situation faite à Bintz. Une campagne débuta en sa faveur. Dans La Bataille syndicaliste, c’est Édouard Sené qui suivit l’affaire, et il en profita pour tirer à boulets rouges sur la franc-maçonnerie, à laquelle Rognoni était affilié.
Le CDS envoya alors Tissier auprès du général Barrau, à Versailles, pour plaider la cause de Bintz. Celui-ci accepta de transiger. Bintz serait transféré dans une autre caserne à la condition qu’il rédige une lettre de contrition, sous peine d’être expédié au bagne militaire. En outre, la campagne de presse devait cesser.

À Vernon, Tissier convainquit Bintz de s’épargner Biribi en faisant amende honorable. En échange, il serait de surcroît exempté de corvée jusqu’à son transfert. Bintz accepta et la campagne en sa faveur cessa.

Mais Rognoni lui tendit un piège : il lui infligea une corvée et Bintz, sûr de son droit, refusa de l’exécuter. Du coup, l’accord tomba à l’eau et il fut expédié dans une compagnie disciplinaire à l’île Madame. Néanmoins, ni La Guerre sociale, ni La Bataille syndicaliste ne reprirent la campagne. À l’assemblée des actionnaires de la BS, Jules Bled se prononça contre.

Dans son journal Terre libre du 1er mars 1912, Émile Janvion suggéra que le peu d’empressement des responsables socialistes et syndicalistes à défendre Bintz était sans doute dû au fait que Rognoni était franc-maçon. Jules Bled était également un franc-maçon notoire. Dans La Guerre sociale du 3 avril 1912, Tissier défendit l’action du CDS en écrivant : « Quand tout paraissait arrangé, notre camarade rendit inutiles tous les efforts du Comité en commettant un nouveau refus d’obéissance. »

En septembre 1912, la revue Le Mouvement anarchiste décida de relancer l’affaire Bintz et fit des révélations sur les tentatives d’intervention maçonniques dans le dossier.
Pierre Martin se rendit au CDS pour convaincre Jean-Louis Thuillier de faire de même. De son côté, Émile Janvion impulsait, avec Émile Pataud, Jean Lacotte et Maintzert, le comité Bintz, dont le but était de défendre le cas du jeune ouvrier, mais aussi de dénoncer le complot maçonnique.
La campagne fut alors menée séparément d’une part par le Comité Bintz de Janvion-Pataud, peu en odeur de sainteté dans les milieux militants, et d’autre part par la FCA, le CDS et, finalement, La Bataille syndicaliste.
Le 2 novembre 1912, le secrétaire de la section de Saintes du CDS, E. Michaud, se rendit sur l’île Madame, où il put rencontrer Bintz, qui témoigna des souffrances qu’il endurait. Trois militants du CDS visitèrent de nouveau Bintz le 24 novembre.

Courant février 1913, après de violents incidents à La Bataille syndicaliste (voir Émile Janvion), la campagne Bintz cessa de nouveau. Le Mouvement anarchiste de janvier-février 1913 constatait : « La franc-maçonnerie l’a finalement emporté contre la solidarité due à un camarade. »


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