Dictionnaire international des militants anarchistes
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Y’en a pas un sur cent… et pourtant des milliers d’hommes et de femmes de par le monde, souvent persécutés, embastillés, goulagisés et parfois au prix de leurs vies, ont poursuivi leur chevauchée anonyme à la recherche d’un impossible rêve : un monde sans dieux ni maîtres.

SAUVANET, Albert

Né le 18 avril 1887 à Commentry (Allier), — mort le 3 mai 1908 à la gendarmerie de Lens (Pas-de-Calais) ; mineur –Pas-de-Calais
Article mis en ligne le 12 juillet 2024
dernière modification le 19 juillet 2024

par Guillaume Davranche, R.D.

Ayant perdu précocement ses parents, Albert Sauvanet quitta l’école devint, à 13 ans, garçon de ferme.

À 18 ans, il entra comme manœuvre à l’usine des Fers creux à Montluçon et en sortit deux ans plus tard comme maréchal-forgeron.

En janvier 1907, il vint dans le Pas-de-Calais et travailla comme rouleur au n°3 de Liévin, puis à la fosse n°2, dite Nouméa, de Drocourt. Habitant Billy-Montigny, il milita alors au « jeune syndicat » des mineurs (voir Benoît Broutchoux).

Le dimanche 3 mai 1908, à 9 heures du matins, il vint vendre L’Action syndicale à la criée avec trois camarades — Jules Saunier, Pierre Raveniaud et Jules Cormeray — à la cité n°3 de Liévin. La Une de L’Action syndicale affichait un dessin du député socialiste Basly en train de se faire soudoyer par les patrons. Un groupe de partisans de Basly prirent alors à partie les quatre militants, qui furent lapidés et roués de coups. Albert Sauvanet reçut une brique à la tempe droite.

Ils se réfugièrent alors chez le camarade Champouret, dont la femme, armée d’un fusil, tint la foule des lyncheurs en respect. La gendarmerie arriva alors et escorta tant bien que mal les quatre militants, menottés, hors de la maison. Jusqu’à ce qu’ils avaient quitté la cité, la foule continua à leur jeter des pierres et à leur donner des coups, et Sauvanet eut une côté brisée. La police les emmena alors à pied à la gendarmerie de Lens, située à une heure de marche. Ils y parvinrent vers 13 heures et furent incarcérés.

Malgré les réclamations de ses camarades, Sauvanet, au plus mal et qui vomissait du sang, fut laissé sans soins. Finalement un médecin arriva vers 17 heures, mais c’était trop tard. Sauvanet expira à 18 heures entouré de ses camarades et de Fernande Richir venue apporter à manger aux prisonniers.

Transporté à l’hôpital, il fut autopsié puis son corps fut conduit au siège du jeune syndicat, 1 rue Émile-Zola à Lens. Il fut enterré à Lens le 6 mai, 300 personnes suivant le cercueil précédé de drapeaux rouges et noirs. Le jeune syndicat avait apporté une couronne mortuaire portant cette inscription : « La Fédération syndicale à son regretté membre Albert Sauvanet, victime des apaches du Vieux-Syndicat ». Sur la tombe, des discours furent prononcés par Dumoulin Broutchoux et Dehay. Le soir même, un grand meeting de protestation fut tenu à la Maison du peuple devant 1 500 personnes.

L’Action syndicale du 10 mai 1908 le présentait comme « instruit, sobre, laborieux et d’une solidarité fort généreuse. Quand son travail était fini, il prenait un livre, lisait, relisait les passages ardus ou bien discutait avec n’importe qui. Il aimait beaucoup discuter et il était tellement convaincu de l’idéal libertaire, malgré son jeune âge, qu’il souriait avec indulgence quand on doutait de l’avènement prochain d’une société communiste. »

Un jeune homme de Liévin, Caupin, comparut devant les assises du Pas-de-Calais le 25 juillet pour le meurtre de Sauvanet. Il fut acquitté. « C’est ce que nous lui souhaitions », écrivit L’Action syndicale, qui voulait faire porter la responsabilité de la mort de Sauvanet sur Basly.


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