Dictionnaire international des militants anarchistes
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Y’en a pas un sur cent… et pourtant des milliers d’hommes et de femmes de par le monde, souvent persécutés, embastillés, goulagisés et parfois au prix de leurs vies, ont poursuivi leur chevauchée anonyme à la recherche d’un impossible rêve : un monde sans dieux ni maîtres.

PESOTTA, Rose [Rachel PEISOTY}

Née à Derazhnia (Ukraine) en 1896 — morte le 7 décembre 1965 — Couturière — New York — Montreal (Canada) — Puerto Rico
Article mis en ligne le 4 janvier 2011
dernière modification le 6 décembre 2024

par R.D.
Rose Pesotta

Rachel Peisoty, née dans une famille juive du shtetl ukrainien de Derazhinia, sympathisa dès l’enfance avec les actions anti tsaristes du groupe La Volonté du peuple. Á l’âge de 16 ans, pour échapper à un mariage arrangé, elle émigrait pour aller rejoindre sa sœur aînée Esther aux États-Unis. En 1919, leur père fut tué lors d’un pogrom des nationalistes ukrainiens.

Arrivée à New York en 1913 et enregistrée à Ellis Island sous le nom de Rose Pesotta, elle était embauchée dans un atelier de couture organisé par la section 25 du syndicat international des ouvriers du vêtement féminin (International ladies Garment workers union — ILGWU) dont elle allait devenir rapidement une active organisatrice. Elle devint la première femme à être nommée membre du bureau de la section 22 du syndicat et participa à de nombreuses grèves. En même temps elle apprenait l’anglais dans des cours du soir et poursuivait des études dans des écoles ouvrières et syndicales. En 1926 elle fut diplômée en sciences sociales du Brookwood Labor College, une école réservée aux activistes syndicalistes de la gauche non communiste.

Militante anarchiste elle participait à de nombreux meetings, écrivait dans la presse et nouait une amitié avec Emma Goldman. Opposée à l’intervention dans la Première guerre mondiale qu’elle qualifiat d’impérialiste, elle fut arrêtée en 1919 lors des raids anti-rouges menés par Palmer et échappa de peu à l’expulsion, ayant pû prouver sa nationalité américaine. Par contre son compagnon fut déporté en Union soviétique et elle ne le revit jamais plus.

Rose Pesotta (1935)

Au début des années 1920 elle participait régulièrement aux activités du Groupe international qui se réunissait au local de la 23e Rue (près de Lexington Avenue) et publiait le journal Road to freedom (New York, 1924-1932) dirigé par Hippolyte Havel. Elle fut la secrétaire de ce groupe Road to freedom. En 1927 sa participation aux campagnes et manifestations en faveur de Sacco et Vanzetti lui valut une nouvelle arrestation. Elle fut également particulièrement active dans le soutien aux compagnons italiens Vicenzo Ferrero et Domenico Sallitto emprisonnés à San Francisco pour leur activité antifasciste et menacés d’extradition en Italie. Par l’intermédiaire de l’avocat Isaac Shorr, elle parvint à les faire transférer à Ellis Island à New York et à obtenir leur libération contre une caution de 7.000 dollars, dont une grande partie fut receuillie grâce à son intervention auprès du syndicat.

Dans les années 1920, au sein de l’ILGWU elle s’opposa toujours aux communistes qui tentaient de contrôler le syndicat et collabora au journal en yiddish Der Yunyon arbeter (New York, 1925-1927) publié par la tendance anarchiste de l’ILGWU dont étaient notamment membres Nicholas Kritzman, Mendal Bluestein, Simon Farber et Israel Ostroff. Dans les années 1930 elle était la compagne du militant italien Mateo Rico qui était particulièrement actif dans les groupes anglais, espagnols et italiens et plus particulièrement dans le groupe publiant le journal Cultura Proletaria (New York, 1927-1953).

En 1933 Rose Pesotta avait été nommée organisatrice nationale permanente de l’ILGWU et l’année suivante fut élue vice présidente du syndicat, devenant la première femme à occuper un poste si élevé dans le syndicat. Jusqu’à la Seconde Guerre mondiale elle allait particper en tant que telle à de nombreuses grèves de l’industrie du vêtement. Lors d’une grève dans une usine de vêtements de sport à Los Angeles, Rose Pesotta, qui avait le sens de la mise en scène, avait convoqué la presse deavant un hôtel où elle fit défiler les jeunes ouvrières avec leurs banderolles et en chemises de nuit ce qui provoqua la sympathie pour les grèvistes et une issue favorable à la grève. A la fin des années 1930 elle participa également aux piquets de grève des travailleurs de Goodyear à Akron (Ohio) et de l’usine automobile General Motors à Flint (Michigan). Lors d’un de ces piquets de grève elle fut si sérieusement battue par une bande de briseurs de grève qu’elle en perdit l’audition. Elle implanta également le syndicat chez les travailleurs mexicains de Los Angeles, les francophones du Québec et à Puerto Rico et fut également une avocate permanente des droits des noirs américains.

En 1940, profondément décue par la domination masculine au sein du syndicat où elle était toujours la seule femme membre de la direction, elle démissionnait de son poste de permanente et retournait à la base comme simple ouvrière.

May Picqueray & Rose Pesotta (New York 1952)

Fervente partisane des alliés pendant la Seconde Guerre mondiale, et profondément choquée en apprenant la Shoah en Europe — où avaient péri plusieurs membres de sa famille — elle adhérait à la Ligue B’nai Brith et participait dans tout le pays à des conférences contre le racisme et l’antisémitisme. Vers 1945-1946 elle allait en Pologne, visitait le camp d’extermination de Maidanek, y rencontrait des survivants qu’elle aida à venir s’installer aux États-Unis. L’impact de l’holocauste provoqua son adhésion au Sionisme et mouvement ouvrier sioniste ; elle devint alors la directrice de l’American Trade union Council de l’Histadrut. Elle continua d’entretenir des relations avec le mouvement libertaire juif, mais aussi italien –elle fut à l’origine au début des années 1950 d’un appel paru dans Freie arbeiter shtimme pour aider les compagnons dans le besoin en Italie — et international.

Rose Pesotta (1965)

Rose Pesotta, qui avait également fait partie de la rédaction du Freie Arbeiter Shtimme et avait été l’une des promotrices des Sociétés confédérales hispaniques et du Libertarian book club, est décédée le 7 décembre 1965 à l’hôpital Mount Sinai de Miami. Plus de 400 personnes participeront à ses funérailles au Gramercy Park (Union Square) de New York le 9 décembre.

Œuvres : — Bread upon the waters (1944) puis Days of our lives (1958), deux volumes de mémoires dont le dernier est dédié à « la civilisation juive détruite par les nazis ».


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