Né en Andalousie — ou à Santos au Brésil comme il l’affirma à une occasion — dans une famille réactionnaire, Manuel Pérez Fernandez apprenti ébéniste dès 1905 au Brésil où il aurait été depuis son plus jeune âge, aurait abandonné le domicile familial en 1909. Après son service militaire, il était devenu charpentier et avait commencé à s’intéresser au mouvement ouvrier et à l’anarchisme.
A Rio de Janeiro il fut le fondateur avec N. Rodrigues et J.M. Pereira du Centre des Charpentiers-ébénistes, une société ouvrière dont il était le président et qui en 1918 fusionna avec le syndicat des charpentiers pour former l’alliance des travailleurs (Aliança dos Trabalhadores) dont il fut nommé président. Très actif lors des grèves qui éclatèrent à cette époque et rédacteur du journal Espartaco, il fut finalement arrêté et expulsé du Brésil en 1919 et renvoyé en Espagne.
A son arrivée à Vigo en novembre 1919, il fut immédiatement arrêté et emprisonné à Madrid et Séville jusqu’en janvier 1920. De nouveau emprisonné en septembre 1920 il fut alors déporté de Séville où il ne put revenir qu’en 1922 et se consacra alors à la réorganisation de la CNT, participant à de nombreux meetings avec notamment S. Segui, F. Alaiz et Pedro Vallina. A l’été 1923, après le transfert du Comité national de la CNT à Séville, il y occupa le poste de comptable aux cotés de Pedro Vallina, Paulino Diez, Manuel Viejo Vital et Juan Nogueroles. Arrêté au domicile de P. Vallina, il fut expulsé en avril 1924 de Séville et gagna le Portugal.
Avec nouamment P. Vallina et José Romero il s’intégra alors à Lisbonne au groupe anarchiste O Semeador dont faisaient notamment partie les compagnons portugais Botelho et Souza. En 1925 il fut le délégué de la CNT à la Conférence commune tenue par la CNT et la CGT portugaise à Evora. Il intégra alors le Comité national de la CGT portugaise et de l’Union anarchiste portugaise (UAP) et participa à la rédaction du joural A Batalha.
Puis en 1925 il émigra en France où il résida successivement à Paris, au Havre et à Marseille où il fut fiché sous le nom de Manuel Pérez Fernando. En 1926 il participa au congrès tenu par les espagnols à Marseille en vue de préparer la fondation de la Fédération anarchiste ibérique (FAI) au cours duquel il s’était opposé aux thèses trop politiques défendues par Garcia Oliver. En 1927 il résidait Villa Elisabeth, sur le chemin du Littoral à L’Estaque. Marié et père de trois enfanst, il était également membre du Centre espagnol du Boulevard Roux à L’Estaque-Plage et donnait des cours de mathématiques aux enfants espagnols. Il aurait donné une conférence sur l’éducation des enfanst le 22 juin 1927 dans le quartier de la Madrague de Montredon à laquelle auraient assisté 25 personnes. Considéré par la police marseillaise comme « un agitateur dangereux », il aurait eu pour projet de réunir en un seul groupe tous les anarchsites espagnols. Il collaborait à la revue Prismas (Béziers, au moins 20 numéros, 1927-1928) et était en relation étroite avec Liberto Calleja de la revue Tiempos Nuevos (Paris, 1925-1927) dont il fut l’un des rédacteurs. Pendant son séjour en France, de 1925 à 1928, il fut membre du Comité espagnol de relations anarchistes, assista à la fondation de la CGTSR et fut en contact avec les militants les plus connus de l’époque (S. Faure, Malato, Grave, Makhno et Archinov notamment).
En 1928 il retournait en Espagne d’abord à Huelva, collabora ai journal Despertad (Vigo) et fut membre du groupe anarchiste Geminal. Il travaillait alors sur les chantiers de l’Exposition de 1929. Après la proclamation de la République, il alla dans les provinces Nord pour y développer la CNT. Début 1931 il était l’un des animateurs de la CNT de San Sebastian — dont il sera nommé plus tard secrétaire —, fut le délégué de la CNT du Nord au congrès de la CNT tenu à Madrid en 1931 (3e congrès dit du Conservatorio) et participa également en décembre au plenum régional de la CNT du Nord.
Vers le milieu de l’année 1932, à la demande du Comité national de la CNT, il alla aux Canaries où en juin 1932 il était membre du Comité de défense prolétarien et le directeur de l’hebdomadaire cénétiste En Marcha (Santa Cruz de Tenerife, 1930-1936). Au premier congrès régional tenu en avril 1933 à Santa Cruz de Tenerife auquel assistèrent pour la confédération Ricardo Sanz et Migule Gonzalez Inestal, il fut nommé secrétaire général de la CNT des Canaries et participa à plusieurs meetings à Santa Cruz de Tenerife. La Fédération CNT de Santa Cruz regroupait alors les syndicats des ouvriers du tabac, des arts graphiques, des ouvriers boulangers, des électriciens, des traminots et un petit noyau de travailleurs du port. Manuel Perez effectua alors une tournée de conférences permettant d’établir des syndicats à Santo André, Crotava, Valle de Arona, Laguna, Buenavista, Santa Cruz de la Palma, Las Palmas et Lanzarote.
Sa participation à cette époque à l’organisation d’une grève révolutionnaire des locataires, lui valut d’être emprisonné avec le compagnon Francisco Sola trois mois au fort militaire de Paso Alto. Très actif lors de grèves victorieuses sur le port, chez les électriciens et les boulangers, il participa également au soutien de 26 ouvriers de l’UGT de Hermigua où lors d’une manifestation attaquée par la Guardia Civil, avaient été tué deux gardes anisi qu’à l’aide et au soutien économique des paysans en grève de l’UGT de Orotava
Impliqué lors du mouvement révolutionnaire de 1933, il fut emprisonné 2 mois à Saragosse. Revenu à Tenerife lors de sa libération, il y fut arrêté au moment de la révolution d’octobre 1934 et fut déporté des Canaries avec sa compagne et leurs 3 enfants.
Il alla alors à Mallorque où il joua un rôle important au journal Cultura Obrera (Palma, 1934-1936) tout en participant à de nombreux meetings à Cadix, Barcelone et Saragosse. Délégué au congrès de la CNT de Saragosse en mai 1936, il y fit partie de la Commission sur le Communisme libertaire et défendit la création immédiate d’une Confédération ibérique des travailleurs.
En juillet 1936, lors du coup d’État franquiste, il parvint à quitter Mallorque et à gagner Valence. Il fit ensuite de nombreuses tournées de propagande tant en Espagne qu’en France où, en 1937, il fit une longue tournée dans le sud avec notamment Armand Guerra. Après les affrontements de mai 1937 avec les staliniens, il fut le délégué de la CNT-FAI-FIJL de Catalogne au Plenum national de Valence où fut refusé l’appui au gouvernement Negrin. A partir de septembre 1937 il fut chargé de la directioon de Ruta (Barcelone) l’organe de la FIJL et fut nommé secrétaire de la régionale CNT andalouse (1938) tout en continuant d’assurer de nombreux meetings. Il participa également au dernier plenum national tenu à Valence en février 1939.
A la fin de la guerre, Manuel Pérez Fernandez était le secrétaire de la régionale andalouse à Baza. Il évoqua ces tristes journées en ces termes : « J’étais alors secrétaire de la régionale andalouse à Baza, et je me souviens avec émotion et orgueil que tous les membres du Comité et son organisme de défense décidèrent de n’abandonner ce secteur qu’après avoir évacué les militants, les vieux, les malades, les enfants et les femmes. C’est à trois heures du matin, le 29 mars, alors que la cinquième colonne se répandait dans la ville, que nous sortions de Baza dans une des ambulances de la 22e Division dirigée par l’excellent camarade Eusebio Sanz Asensio. En passant à Murcie, nous traversâmes la ville à tir ouvert pour ne pas tomber aux mains de cette cinquième colonne auxquels s’étaient unis, appludissant Franco, les carabiniers… En fin de journée, particulièrement dure, nous arrivâmes à Alicante où au siège de l’Agrupación socialiste, sous les auspices du Comité régional se tint une dernière réunion en ces heures amères et incertaines, alors que nous ignorions tous quel serait notre destin » (cf. CNT, avril 1953). Fait prisonnier à Alicante en avril 1939, il fut interné aux camps de Los Almendros et Albatera.
Remis en liberté provisoire en 1941 sur intervention du Consul brésilien de Cadix, Manuel Pérez Fernandez s’embarquait en mai pour le Brésil où il allait s’installer à Rio de Janeiro et continuer de militer dans le mouvement libertaire. Employé comme comptable dans une imprimerie, il participa avec notamment E. Leuenroth, Edgar Rodrigues et Pedro Catallo à la fondation en 1946 du journal Açao Direta (Rio de Janeiro) et aux travaux préparatoire du Congrès anarchiste international de 1948. Dans les années 1950 il fut l’un des fondateurs avec notamment Dalmau, Navarro et Cubero du groupe anarchiste José Oiticica.
Les 7-8 octobre 1961 il fut le délégué de la Fédération locale de Rio au 2e Congrès du noyau de la CNT en exil au Brésil, tenu à São Paulo (délégué, Brillas) et auquel participèrent outre Rio et São Paulo, les FL de Porto Alegre (délégués, Pujol et Fernandez), de Santos et une délégation de l’Alliance libertaire du Brésil. Victime d’une fracture du col du fémur à la suite d’une chute en septembre 1962, il dut rester près de 10 mois hospitalisé et cesser toutes activités. Le 5 octobre 1963 il eut encore la force de participer à un meeting public contre la dictature de Salazar où il fit une intervention sur la guerre et la révolution espagnole. Manuel Pérez Fernandez, dont la compagne Mercedes était morte à Rio le 20 octobre 1953, est décédé le 16 juin 1964 à Rio.
Manuel Perez Fernandez outre les tires cités ci-dessus, avait collaboré à un très grand nombre de tires de la presse libertaire notamment Campo libre, CNT (Toulouse), Esfuerzo, Espoir (Toulouse), Fuego, Horizontes, Liberacion (Barcelone), Mas Alla, Nervio (Paris), Solidaridad obrera (Barcelone et Séville), Solidaridad obrera (Paris), La Tierra, Tierra y libertad (Mexico), Trabajo (Manresa) et La Voz de Menorca. Au Brésil il était conu sous le nom de Manuel Peres.
Oeuvres : — Abajo las armas ; — Cuatro meses de barbarie : Mallorca bajo el terror fascista (Valence, Servisio de informacion, propaganda y prensa del CN CNT-FAI, 1937) ; — Redencion ; — Memorias (Rio, 1951, inédites).