Cheminot de petite taille, peu loquace, grand lecteur et amateur d’art, Pedro Herrera Camareto avait adhéré très jeune au syndicat CNT des chemins de fer. Dans les années 1920, il vivait à Barcelone où il était l’un des diffuseurs du Suplemento de la Protesta (Buenos-Aires). Au début des années 1930 il était l’un des animateurs du groupe Nervio de la Fédération anarchiste ibérique (FAI). Ce groupe avait été fondé par Diego Abad de Santillan dès son arrivée à Barcelone ; il comprenait entre autres Ildefonso Gonzalez Gil, Manuel Villar, Fidel Miro et le portugais Germinal de Sousa En 1934 il fut, avec Barranco, Diezhandino et d’autres, délégué au congrès national de la Fédération nationale de l’industrie ferroviaire (FNIF) tenu à Madrid.
Après le soulèvement franquiste, il représenta en août 1936 la FAI au comité de liaison UGT — PSUC — CNT et en octobre fut le signataire le 22 octobre pour la FAI d’un pacte d’alliance avec ces organisations. Le 27 octobre il participait aux cotés de F. Montseny et Mariano Vazquez (CNT), Antonio Sesé et Rafael Vidiella (UGT), Comorera (PSUC) et du consul soviétique Antonov Ovseenko au meeting qui réunissait 200.000 personnes à Barcelone pour célébrer ce pacte. En octobre il fut nommé responsable du commerce au conseil d’économie de la Généralité de Catalogne dont étaient responsables les libertaires Andrés Capdevila (président) et Joan P. Fabregat (ministre) et dont étaient également membres les libertaires Cosme Rofes (santé), Josep Presas (finances), Enroc Farriols (énergie) et A. Garcia Birlan (arts graphiques). Il remplaça ensuite A. Garcia Birlan comme conseiller à la santé publique du gouvernement de la Généralité de Catalogne de décembre 1936 à avril 1937, poste où il sera l’un des signataires le 25 décembre, du décret autorisant l’avortement. Il fut ensuite nommé secrétaire du Comité péninsulaire de la FAI qu’il représentera dans de très nombreuses réunions, puis, à partir de juillet 1937, il fut également secrétaire du Comité national de la Solidarité Internationale Antifasciste (SIA). Lors du plenum national du mouvement libertaire tenu du 16 au 30 octobre 1938, il critiqua durement au nom de la FAI les positions défaitistes de Mariano Vazquez le secrétaire de la CNT. Le 23 janvier 1939, à quelques jours de la chute de Barcelone, en tant que secrétaire de la FAI il cosignait avec M. Vazquez le télégramme suivant adressé aux organisations ouvrières françaises : « Ne nous fournirez-vous point, camarades ouvriers, républicains et démocrates de France, les moyens de nous défendre ? Vous savez bien qu’en sauvant notre vie, nous sauvegardons la vôtre. Il nous faut des armes en abondance. Faites qu’elles nous parviennent vite. Sinon vous contribueriez à notre défaite et à notre mort. Et votre conscience en serait à jamais troublée. »(cf. SIA, 26 janvier 1939).
Exilé en France, lors de la Retirada, il fut en février 1939 l’un des membres — avec F. Montseny, Germinal Esgleas, Mariano Vazquez, Juan Garcia Oliver, Germinal de Sousa, Valerio Mas et Francisco Isgleas — du Conseil général du mouvement libertaire espagnol en exil et l’un des signataires, au nom de la FAI, de l’accord de dépôpt des archives de la CNT-FAI à l’Institut d’histoire sociale d’Amsterdam. Le 18 mars 1939 il figurait sur une liste de 29 anarchistes espagnols autorisés à résider à Paris ou dans le département de la Seine pour une durée de un mois à trois ans. La police qui le qualifiait de « très actif… en relations avec les anarchistes d’Angleterre et d’Amérique du sud » le considérait comme le responsable du Comité péninsulaire de la FAI. Il fut également à cette époque l’un des interlocuteurs de la CNT pour l’acquisition avec le compagnon français Jean Roumilhac du domaine d’Aymare (Lot) où trouvèrent asile de nombreux réfugiés à leur sortie des camps.
Le 8 décembre 1940, Pedro Herrera fut arrêté par les autorités de Vichy et interné au camp du Vernet comme « anarchiste dangereux pour l’ordre public » avant d’être déporté le 11 juillet 1942 à bord du Sidi Aïssa au camp de concentration de Djelfa (Algérie). Il faisait partie du 9e convoi (sur 10, mars 1941-décembre 1942) d’étrangers “indésirables” déportés en Afrique du Nord par les autorités de Vichy. Ce convoi comprenait 45 militants libertaires dont Germinal de Sousa, J. J. Domenech, Pedro Herrera, F. Alemany, Antonio Ortiz, Ricardo Sanz, Francisco Isgleas et Agustin Roa.
A la libération de l’Agrique du nord, il collabora au journal Solidaridad obrera (Alger, 1944). Partisan de la tendance orthodoxe, il fut nommé secrétaire de la Commission intercontinentale (CI) du MLE-CNT en novembre 1947 et participa à la même époque à la réorganisation de la SIA en France. En juin 1948, il aurait participé comme délégué de l’AIT à un congrès des Comité de défense syndicale tenu en Italie à Livourne.
Puis il démissionnait du CI et émigrait en 1949 en Amérique latine.
Après un séjour à Rio de Janeiro il s’installait à Buenos Aires où il allait travailler comme comptable. Nommé secrétaire aux relations internationales de la Fédération Libertaire Argentine (FLA), il collaborait à la revue Reconstruir. Au fil des ans, il se raprocha des positions réformistes, et au début des années 1960, avait appuyé l’opération dite des « cincopuntistes » (accords entre d’anciens membres de la CNT et les syndicats verticaux franquistes) tout comme deux autres anciens membres du groupe Nervio, Abad de Santillan et Manuel Villar.
Pedro Herrera Camarero est décédé à Buenos Aires le 28 octobre 1969.
Œuvres : — L’AIT » (Alger, 1946, en collaboration avec Pérez Burgos)