Dictionnaire international des militants anarchistes
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MOUCHERAUD, Adrien, Eugène
Né à Paris IVe le 14 mars 1865 - Imprimeur litographe - Paris
Article mis en ligne le 29 septembre 2008
dernière modification le 20 avril 2024

par Dominique Petit, R.D.
Adrien Moucheraud

Adrien Moucheraud (parfois orthographié Moucherot et Mouchereau) fréquenta l ’école jusque 12 ans, puis entra en apprentissage de lithographe. Il avait deux frères plus jeunes dont Paul Yves, lui aussi anarchiste.

Adrien Moucheraud entra dans le mouvement anarchiste vers la fin de l’année 1885 où il fut notamment signalé dans les réunions du groupe La Vengeance dans le Ve arrondissement. Le 18 décembre 1885, il fut arrêté au moment où il apposa des affiches du Comité exécutif révolutionnaire, annonçant pour le lendemain un meeting, place du Chatelet.

Il s’agit sans doute du Moucheron (sic) exclu du groupe La Vengeance en février 1886 pour avoir pris la défense de François Martin (voir ce nom) accusé par Rozier d’être “un escroc et un mouchard”. Il aurait alors été membre du groupe Germinal formé avec Derue et le docteur Robequain entre autres. Il était également signalé comme membre de la Ligue des antipatriotes.

Le 11 juin 1886, à Paris, il fut condamné à 2 mois de prison pour provocation d’un attroupement et le 11 septembre 1886, à 15 jours de prison pour le même motif. Le 15 octobre il avait été arrêté pour purger sa peine.

Au début de l’automne 1886 les deux frères Moucheraud avaient été signalés dans les réunions du Groupe d’études sociales du Ve arrondissement qui avait succédé au groupe La Vengeance. L’un des frères avait été nommé trésorier du groupe. Début 1887 Moucheraud avait renommé le groupe Ligue des antipatriotes du Ve. Il demeurait alors 7 rue Rolin (Ve arr.) et participait aux réunions du groupe Le Léopard du Panthéon, animé par son frère Paul.

Adrien Moucheraud, qui demeura 7 rue Jeanne puis 43 Boulevard Saint-Germain, fut l’imprimeur-gérant de l’hebdomadaire L’Avant-garde cosmopolite (Paris, 8 numéros du 28 mai au 25 juillet 1887) qui selon Pouget avait été fondé par Octave Jahn, Murjas, P. Paillette et Tennevin. Dans une circulaire annonçant la parution on pouvait lire : « … Notre titre sera l’Avant garde cosmopolite, rédigé par les jeunes. Oui, nous les jeunes, nous marcherons de l’avant et rien n’empêchera notre marche. Si sur notre route nous trouvons des obstacles, nous les briserons comme les vagues de la mer brisent les rochers… ». Le 27 mai 1887, lors d’une réunion plénière des groupes anarchistes de Paris à la salle Favié, le compagnon Vaillant (Auguste ?), avait précisé que le premier numéro avait été tiré à 4000 exemplaires, avait couté 440 francs, que le n°2 serait tiré à 10.000 exemplaires et que le groupe disposait d’une caisse de 3000 francs, dont 500 donnés par Octave Jahn avant son départ pour la Belgique et 200 francs donnés par Defuisseaux lors de son passage à Paris (cf.APpo BA 75). Il était membre du groupe La Lutte avec entre autres Murjas, Louiche, Couchot et Pivier. Comme son frère Paul, il était aussi membre de la Ligue des antipropriétaires spécialisée dans les déménagements "à la cloche de bois" et fondée par Couchot.

Le groupe avait également publié à cette époque un recueil intitulé Chants et poésies révolutionnaires (14 p.) contenant les paroles de Germinal - Les logements insalubres - Iconoclasie - Famille - Profession de foi - Aux pauvres - Compagnon Cupidon - La Marianne - Le drapeau rouge - La Carmagnole - La Bataille - J’ n’aime pas les sergots - Le Père Duchesne - La Cosmopolitaine (voir Portfolio).

Le 30 avril 1887, avec son frère Paul, il avait fait partie d’un groupe de compagnons qui, à la sortie d’une réunion publique organisée par le groupe L’Avant Garde, avait été pris à partie à Saint-Germain en Laye et, comme son frère, avait ouvert le feu contre les individus qui leur jetaient des pierres.

En mai 1887, lors es élections municipales, il avait été candidat abstentionniste dans le Ve arrondissement au nom du groupe Le Léopard du Panthéon.

En décembre 1887 il avait été pressenti pour être le gérant du nouveau journal ça ira.

En janvier 1888 l’un des Moucheraud était signalé dans les réunions du groupe Les Gueux, qui se réunissait salle Gaucher, rue de la Montagne Sainte Geneviève et n’eut qu’une existence éphémère, ayant, semble-t-il, disparu dès le printemps.

Au printemps 1888 il demeurait 46 Quai d’Anjou et était l’un des animateurs de la Ligue des Antipatriotes. A cette même époque il avait été détenu, semble-t-il, suite à des incidents lors du meeting boulangiste tenu le 25 mars salle Rivoli et le 14 mai suivant il fut poursuivi avec les organisateurs de la réunion Landriot et Sureau (absents) et Lucas (prévenu libre) pour cette affaire de meeting ; il semblerait que la recette, à l’origine destinée au journal Terre et Liberté, avait été détournée par Sureau (voir ce nom) et Landriot et que ceux ci aient également omis de payer l’imprimeur des affiches et la location de la salle. Tandis que Landriot et Sureau étaient condamnés par défaut à 6 mois de prison, Moucheraud était condamné à 1 mois (pour escroquerie) et Lucas semble t il mis hors de cause. A l’énoncé du jugement Moucheraud s’était écrié “un jour siégerait un tribunal révolutionnaire pour juger la bourgeoisie ! Vive l’anarchie !”, cri qui avait été repris par les anarchistes présents dans la salle.

Fin 1888 il avait été avec Georges Brunet (nommé trésorier) l’un des organisateurs d’un nouveau groupe de jeunes dont il fut nommé secrétaire. Il demeurait alors 25 Quai de la Tournelle.

Début 1888, l’un des frères Moucheraud avait été l’auteur d’un manifeste abstentionniste lors des élections municipales à Paris.

Son frère Paul Moucheraud qui résidait rue Charlemagne, fut arrêté le 22 avril 1892, comme de très nombreux compagnons tant à Paris qu’en banlieue et en province, préventivement à la manifestation du 1er mai. Lui même avait été l’objet d’une perquisition où la police avait saisi quelques brochures et des placards Le Père Peinard au populo et Les anarchistes au peuple de Paris, et un manifeste de la Jeunesse socialiste des Écoles dont il était le signataire en tant que secrétaire du groupe. Il fut arrêté.

Début janvier 1894 les frères Adrien et Paul Moucheraud furent arrêtés et perquisitionnés lors des rafles suivant l’attentat de Vaillant au Palais Bourbon, puis de nouveau le 4 mars suivant. Selon la police, Adrien se disait alors professeur de théologie.
Le 4 mars, le commissaire de St Germain des Prés se transporta au 7e étage où se trouvait la chambre d’Adrien Moucheraud. Malgré des appels réitérés, il répondit que « la conduite de la police était indigne du 3e république, qu’il étaient des bandits ». Il fallut requérir un serrurier qui ouvrit la porte malgré ses cris furieux. La perquisition amena la saisie d’un poignard, d’une collection de l’Avant-garde cosmopolite, d’un exemplaire de la Révolte sur le procès de Ravachol, de placards anarchistes, d’un volume ayant pour titre « Le procès des anarchistes de Lyon » d’un carton sur lequel était collé l’attentat de Gallo à la Bourse, un appel aux conscrits de la Ligue des antipatriotes, d’une affiche du groupe anarchiste Le Léopard du Panthéon, visée par Moucheraud, comme candidat aux élections municipales du 8 mai 1887, une copie incomplète d’un jugement prononcé contre Villaret, Bricou, Moucheraud et Robequin, le 15 avril 1886, une carte d’Élisée Reclus qu’il avait rencontré à la Société de géographie et un exemplaire de l’Égalité relatif à Padlewski qui avait assassiné à Paris le général russe Séliverstoff. Durant toute la perquisition Moucheraud ne cessa d’injurier les policiers et de les menacer de poursuites pour violation de domicile.
Au moment où il fut mis en état d’arrestation, Moucheraud menaça et injuria le commissaire de police et s’écria que c’était « toute la Préfecture de police qu’il fallait faire sauter ».
Interrogé au commissariat de St Germain des Prés, il se déclara nihiliste et ami de Padlewski dont il avait trouvé magnifique l’acte qu’il avait accompli. « Je ne préconise pas le suffrage universel, parce que voter, c’est s’avilir, c’est à dire qu’on est une bête incapable de se conduire. Quand la masse ne sera plus abrutie par la société actuelle, elle n’aura plus besoin de voter, pour arriver à la transformation de l’État social ». A la question s’il était anarchiste, il avait répondu “Je ne suis pas anarchiste, si je me suis dit anarchiste tout d’abord, c’est que j’admets la philosophie anarchiste et communiste, mais je suis nihiliste” ; et comme on lui avait demandé ce qu’il entendait par ce terme, il avait ajouté : “Je suis l’amant du néant. Je suis partisan d’une société meilleure qui succédera à celle que nous avons sur les ruines du vieux monde, après le cataclysme fatal”.
Il fut incarcéré à Mazas.

Le 4 mai 1894, le juge d’instruction Meyer désigna deux médecins afin d’examiner l’état mental de Moucheraud afin de déterminer s’il était responsable de ses actes ou devait être enfermé dans une maison d’aliénés. Le rapport conclut à sa responsabilité tout en notant une grande exaltation.
Devant le juge d’instruction, il déclara que « toutes ces poursuites étaient honteuses », qu’il n’avait qu’un désir « qui se réalisera un jour, c’est de voir tous les fonctionnaires de la police conduits à Mazas et fusillés ensuite ». S’adressant à M. Meyer, il lui déclara « qu’il provoquait les bombes en osant faire un pareil métier et qu’un de ces jours, il sauterait ».
Le 16 juin 1894, il fut mis en liberté provisoire.

Le 30 juin 1894, un nouveau mandat de perquisition et d’amener fut délivré par le préfet de police, pour un motif identique.
Le 1er juillet à 7h15 du matin, le chef du service de la 2e brigade de recherches, se présenta 43 boulevard St Germain et perquisitionna la chambre de Moucheraud qui déclara ne plus s’occuper d’anarchie mais uniquement de son travail de lithographe et d’aérostation. Il fut mis en arrestation et emmené au commissariat de la rue Saint-Séverin.
Le 4 juillet il fut transféré à Mazas, sa mère qui était malade, et des habitants du quartier réclamèrent sa libération. Le 10 juillet, il fut libéré.

Le 20 juin 1895, le juge Meyer délivra une ordonnance de non-lieu pour l’inculpation d’association de malfaiteurs.


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