En mai 1896, Marie Huchet, alors secrétaire du syndicat des fleurs et des plumes, fut chargée lors d’une réunion de solidarité avec les ouvrières diamantaires de Pantin, de leur remettre une partie des 23, 50 francs perçus ce jour là, l’autre partie étant destinée aux porcelainiers de Limoges.
De janvier 1897 à mars 1899, Marie Huchet participa comme oratrice à 26 conférences, en région parisienne, sur les sujets les plus divers. Dans ses meetings elle intervint rarement seule mais au milieu d’autres orateurs, la plupart masculins, avec quelque exceptions féminines, comme Eliska Bruguière, Louise Réville, Maximilienne Biais, Rolande, Alice Canovas ou Astié de Valseyre. Elle collaborait également au Libertaire.
Le 4 février 1897, une réunion fut organisée, salle du Commerce, 91 boulevard du Temple sur le thème « Les crimes du diable », avec Paul Raubineau et Albert Létrillard. Marie Huchet y prit la parole, elle dénonça « l’exploitation scandaleuse grâce à laquelle les prêtres se font des rentes et vivent largement à ne rien faire en escroquant les malheureux qu’ils ont fanatisés ». Girault, Sadrin, Tortelier, Léon Barrier et Prost s’exprimèrent avec elle.
Le 8 février 1897, la préfecture n’ayant pas autorisé la réunion qui devait se tenir Salle du Commerce, les anarchistes présents, conduits par Marie Huchet, se rendirent dans un débit de boisson au n°19, dans la salle Turpin. Environs 80 compagnons y assistèrent, parmi eux, Prost, Sadrin, Georges Renard, Murmain dit l’Aveugle, Gravelle, Lucas et Raubineau. Marie Huchet prit la parole en première « Lisant une page écrite par avance qu’elle avait sous les yeux ». Elle démontra que « Le mariage devrait disparaître parce qu’il faisait de la femme une esclave, à cause des liens par lesquels cette institution la lie à l’homme, son maître ». Elle fit ensuite un court exposé en faveur de l’amour libre et critiqua les préjugés du mariage qui consistaient à détruire tout sentiment élevé chez l’être humain. Elle estima que « tout être doit aimer librement et jouir de ce bonheur avec celui pour lequel il éprouve des désirs qui en vertu des lois de la nature doivent être assouvis ». Elle fit appel à toutes les prostituées « qui sont aussi des victimes de l’état social actuel » et conclut, en déclarant que par l’amour libre, la société sera régénérée et contribuera à la constitution de la société libertaire. Elle termina son intervention en disant : « Vive l’amour libre ! Vive l’anarchie ! ».
Début février 1897, la Ligue de propagande d’athéisme et la Société du baptême civil, organisèrent un fête familiale, salle de la Ligue fraternelle, 17 rue Daint-Isaure. Après une allocution d’Albert Létrillard, un concert eut lieu, avec les chansonniers Paul Paillette, Jehan Rictus, Marie Huchet poussa la chansonnette. A l’issue du spectacle, une distribution de jouets fut faite pour les enfants et un bal se prolongea tard dans la nuit.
Le 15 février 1897, salle de l’Eden, 49 rue de Bretagne, un meeting fut organisé par l’Internationale scientifique sur « Les crimes modernes : Cuba, Montjuich, Madagascar, Arménie et sur Le communisme et l’individualisme ». Trois commissaires de police assistèrent à la réunion et firent un rapport. Devant 100 à 200 personnes, Mary Huchet commença son intervention en revenant sur les propos tenus par un inconnu, lors d’une précédente réunion, accusant les anarchistes d’être des ignorants : « Non, les anarchistes ne sont pas des ignorants ; car seuls, ils connaissent la vraie science de l’humanité. Cette science leur fait découvrir la source du mal dont souffre la société. Tout ce mal vient de la religion et de toutes ses manifestations dans le monde, de l’État, de la famille, etc. Voilà pourquoi il faut la détruire ». Elle raconta qu’un arménien lui ayant demandé de rédiger un article en faveur de ses compatriotes, elle lui répondit que « tout homme imbu des dogmes religieux n’était pas prêt pour l’émancipation » et lui manifesta son regret de voir des êtres humains s’entre-tuer pour des questions aussi stupides.
Le 27 février 1897, La Ligue antireligieuse et les Libertaires de Paris tenaient meeting à la salle du Commerce, faubourg du Temple, 300 personnes assistèrent à la réunion. L’ordre du jour était éclectique : « La question d’Orient ; les crimes des religions, les tortures de Montjuich ; Cuba et l’Arménie ; les infamies sociales ; église, patrie et religion ; les tortures des juges d’instruction ».
Après Raubineau, Marie Huchet prit la parole. Elle expliqua que « Le peuple souffre, qu’il y a en ce moment beaucoup d’ouvriers sans travail et que c’est malheureux de voir de pauvres diables manger un morceau de pain qu’ils ont mendié ». Parlant du patronat, elle s’étonna que « L’ouvrier se laisse commander, comme une bête de somme et qu’il était temps qu’il se révolte contre cette société de bourgeois, société pourrie, qui, il faut l’espérer, disparaître bientôt, pour faire place à une autre. Celle-ci sera fondée sur des bases sociales par lesquelles tout le monde sera libre et heureux ». Selon l’un des trois rapports de police rédigés sur cette réunion ce fut à ce moment, que de nombreux cris et quolibets à son adresse, éclatèrent dans la salle. On lui aurait crié : « Ferme ta gueule ». Elle aurait été obligée de quitter la tribune, mais les deux autres rapports, n’évoquèrent pas ces incidents et invectives.
Le 5 mars 1897, eut lieu à l’église Saint-Ambroise, une conférence par un « frère prêcheur » pour traiter de la « richesse et de la pauvreté ». L’orateur en profita pour faire de la propagande en faveur du socialisme chrétien et pour attaquer avec violence les libres-penseurs. Ce discours provoqua des réactions, un spectateur voulut répondre et fut frappé par le « suisse », une bagarre s’ensuivit. Une conférence du même genre étant annoncée la semaine suivante, les anticléricaux et anarchistes se mobilisèrent. Un assez grand nombre de compagnons se rendirent le 11 mars à l’église. Au moment de la sortie, un cri formidable de « Vive l’anarchie » fut poussé par une trentaine d’anarchistes et une bagarre se produisit. Marie Huchet se jeta sur un vicaire qui, à la tête de jeunes gens du patronage, armés de cannes, chargeaient les manifestants et frappa « Le calotin qui cognait sur les copains anarchos que les manifestants cléricaux avaient la lâcheté d’assommer à coups de cannes Aussitôt les gardiens de la paix firent irruption et des arrestations furent opérées : Marie Huchet, Albert Létrillard qui protestait contre les brutalités qu’elle subissait, en criant aux agents : « C’est ignoble de maltraiter et d’arrêter une femme dans ces conditions ». Furent également arrêtés Gardin, menuisier ; Lebrun, typographe ; Ebner, sténographe ; Carré, fleuriste et Girault.
Après 5 jours de détention préventive, les inculpés furent traduits devant la 9e chambre correctionnelle, le 16 mars 1897. Gardin, Lebrun, Girault, Ebner et Carré furent condamné à 15 jours de prison et Marie Huchet à 8 jours. Létrillard eut 50 francs d’amende.
Internée à la prison de Nanterre, elle écrivait : « Demain je sortirais d’ici comme un chenapan, comme une brebis galeuse : cela m’et égal. Je suis anarchiste et j’en suis fière !… Puis il faudra que de nouveau je lutte pour la vie, que je débatte encore de prix avec un patron qui me marchandera e que j’ai de plus cher : dix heures de liberté ! Ignoble vampire qui escomptera son vol avant même que je travaille… La lutte recommencera ; j’y rentrerai avec une volonté retrempée…. » (cf. Le Libertaire, 1er avril 1897).
Le vendredi 19 mars 1897, une conférence eut lieu à la salle du Commerce qui réunit 200 personnes dont Prost, Raubineau, Geoges Renard, Broussouloux, Létrillard, Brunet et Butaud. Prost protesta contre les arrestations. Létrillard demanda pourquoi on avait envoyé Marie Huchet à Nanterre au lieu de l’envoyer à Saint-Lazare : « De cette façon, au lieu d’être libérée jeudi, comme elle devait l’être, elle ne le sera que dimanche prochain ».
Le 16 avril 1897, la Ligue de propagande et d’athéisme tenait son banquet gras annuel à l’occasion du « Vendredi, prétendu Saint- », Marie Huchet, Achille Leroy, Létrillard, Ténière « La camarade de Sébastien Faure » accompagnée de Sidonie Vaillant et une trentaine de convives se partagèrent le cochon.
Le 29 mai, à la salle du Commerce, la Ligue antireligieuse et les Libertaires de Paris organisèrent une réunion à laquelle assistèrent 250 personnes. Prost provoqua un tumulte épouvantable dans la salle en disant qu’il ne fallait pas compter sur les sans travail, car « ce ne sont que des avachis et des inconscients ». Leboucher à sa suite ne put se faire entendre, Marie Huchert arriva à son tour à la tribune mais elle ne réussit pas plus à parler. Un bagarre se produisit dans la salle.
Marie Huchet prit l’initiative de créer un groupe de femmes à l’intérieur du groupe de l’Internationale scientifique : elle fit paraître cet avis dans Le Père Peinard du 20 juin 1897, : « Etant donné l’attitude des bourgeoises qui dans leur soi-disant but d’émanciper les femmes prolétaires, les compagnes de lutte désirent elles-mêmes discuter leurs intérêts et leurs revendications et cela sans l’intervention des bourgeoises et des exploiteuses du travail.
Le groupe se réunira tous les jeudis, salle Rosnoblet, 281 faubourg Saint-Denis, à partir du 17 juin. Y prendront la parole : Mary Huchet et Eliska.
Il n’y sera fait aucune collecte et les adhérentes garderont l’anonymat.Retour ligne automatique
Pour le groupe : Mary Huchet
Les compagnes des libertaires sont particulièrement invitées et, une fois pour toutes, les prolétaires se débarrasseront des parasites bourgeoises.Retour ligne automatique
Le groupe féminin se rattachant à l’Internationale scientifique, une réunion générale aura lieu une fois par mois ».
Le 26 juin 1897, salle Pétrelle, eut lieu un meeting organisé par les anarchistes au profit des exilés d’Espagne. 90 à 100 personnes y assistèrent. Marie Huchet défendit les camarades espagnols : « ceux-là ont terrorisé la bourgeoisie et montré que les théories anarchistes seront bientôt celles qui culbuteront la vieille société ». Elle dénonça également le sultan et cette « vieille garce de reine d’Angleterre ».
Le 11 septembre 1897, salle Baumann à Saint-Ouen, les groupes révolutionnaires de Saint-Ouen et les Libertaires de Paris, organisèrent un meeting sur « le pain cher, l’assassinat de Canovas et du bourreau Portas ; les victimes de l’inquisition espagnole » avec comme orateurs Malato, Létrillard, Georges Etiévant, Brunet, Girault, Sadrin, Tortelier et Mary Huchet. Environs 70 personnes assistèrent à la réunion. Marie Huchet exposa les théories anarchistes et engagea les travailleurs à faire de la « propagande par le fait » dans les ateliers. Elle fit un appel pour la fondation d’une bibliothèque libertaire à Saint-Ouen. Elle fit savoir qu’elle venait de fonder, avec Louise Coutant, ancienne secrétaire des syndicats des blanchisseuses et des infirmières à la Bourse du travail, un groupement féminin dans lequel toutes les ouvrières seront admises.
Le 28 septembre, à la Maison du peuple, Mary Huchet fit une conférence sur « le Droit des femmes à révolution, l’exploitation du travail, les salaires dérisoires ». Louise Coutant et Ernest Girault prirent ensuite la parole. Une lettre de Louise Michel fut lue lors de la soirée.
Mais le 10 décembre 1897, Louise Coutant fit une tentative de suicide et début janvier 1898, elle était encore hospitalisée, pour une opération, mettant sans doute fin à cause de ses problèmes de santé, à une tentative de création du groupement féminin de L’Internationale scientifique.
En octobre 1897, Marie Huchet aida le naturien Louis Martin à poser des tentures dans son Pavillon Sans Dieu, 96 rue Lepic.
En avril 1898, Eugène Renard, dit Georges, lui écrivit qu’il rentrait à Paris, après son équipée désastreuse contre les antisémites à Alger.
Aux élections générales de mai 1898, Marie Huchet et Louise Coutant défendirent la candidature de Paule Minck, pour revendiquer le droit des femmes à l’égalité entière, tout en reconnaissant que « Les femmes ne seront complètement affranchies qu’avec et par le socialisme ».
Le 2 juillet 1898, lors d’une réunion à la Maison du peuple, 47 rue de Ramey, avec pour thèmes : « Dreyfus, Zola, l’État major” ; “La grève générale” ; “Etiévant à la Roquette », l’assistance se composait de 120 personnes, Marie Huchet s’opposa à Louise Réville sur la distinction entre Etiévant et Carara, un autre condamné. Pour elle, tous deux étaient des révoltés, Carara fut acculé au meurtre par la misère. Marie Huchet déclara que l’on devait moins s’occuper de l’affaire Dreyfus que de continuer à faire de la propagande vraiment anarchiste. Elle souhaita, en terminant, la venue « de la société de nos rêves où tous les hommes pourront enfin vivre dans la concorde et l’amour ».
Le 25 septembre et le 2 octobre 1898, la conférence organisée à la salle Delapierre, 168 rue de Charenton avait pour thème « L’union libre — L’amour libre et l’immoralité dans le mariage ». Marie Huchet trouva extraordinaires, les préjugés de la vieille société bourgeoise qui voulait pour sa moralité qu’une femme resta éternellement liée au même homme. « Une fille-mère mériterait les mêmes compliments que la reine ou l’impératrice qui met au monde un enfant ». Elle ajouta qu’elle avait vu dans la salle certaines figures de policiers qui feraient bien de changer de barbe pour masquer la figure de leur emploi. Eugénie Collot, Alice Canova, Sadrin et Prost prirent aussi la parole, ce soir-là.
Le 25 octobre 1898, à la sortie d’une réunion qui se tenait à la salle Prat, 220 rue St Denis, les participants allèrent sur les grands boulevards où ils rencontrèrent une centaine de manifestants qui criaient : « Vive la liberté, vive Zola ». Libertad était en tête. Les agents de police intervinrent et arrêtèrent Marie Huchet, Georges Renard, sur le boulevard Magenta.
En novembre 1898, Marie Huchet participa à un meeting salle Delapierre avec Brunet, Butaud, Broussouloux, Louise Réville, Maximilienne Biais et Rolande sur le militarisme.
Le 26 mars 1899, salle Delapierre, 163 rue de Charenton, eut lieu une conférence privée sur « Les droits de la femme, la pieuvre cléricale, l’armée contre la nation » avec Mary Huchet, Maximilienne Biais, Alice Canovas, Astier de Valseyre, Jaurès, Briand, Janvion, Henri Dhorr, Brunet. Les groupes anti-cléricaux furent invités.
En 1899 elle participait aux réunions du groupe Les Iconoclastes de Janvion.
En octobre 1899, Mary Huchet lança un appel dans L’Aurore, pour fonder des syndicats féminins, en particulier chez les « casseuses et rangeuses de sucre ». Elle se tenait à leur disposition chaque soir, 10 rue Devret, pour leur donner la marche à suivre, rédiger leurs statuts et organiser leurs réunions publiques. Ce fut la dernière fois que l’on parla de Marie Huchet dans la presse.