Victor Busquère était le fils d’un mineur originaire de la Haute-Loire qui serait devenu ouvrier de l’Arsenal maritime de Toulon, d’opinions anarchistes. Marié, père d’un enfant, il résidait à Toulon, au quartier du Pont-de-Bois. Il entra à l’Arsenal maritime dans l’atelier de la petite chaudronnerie, le 20 mars 1894 et fut titularisé en 1902. Après s’être engagé pour trois ans (1895-1898) dans l’artillerie de Marine, il fut admis à l’atelier des bâtiments en fer. Il passa dans celui de la grosse chaudronnerie en février 1902. Le personnel de cet atelier était connu pour ses opinions “avancées”. Il fut plusieurs fois sanctionné pour non-respect de la discipline intérieure.
Busquère fut l’ un des fondateurs du groupe antimilitariste de Toulon en 1904 puis du groupe anarchiste La Jeunesse libre en 1907. Il était secrétaire de la section locale de l’Association internationale antimilitariste (AIA) qu’il avait fondé en 1904 avec Antoine Bertrand et membre du syndicat des ouvriers du port. Le 12 mars 1905, avec E. Girault, Cosmao et Leblond, il fut l’orateur du meeting tenu par l’AIA à la Bourse du travail avant la manifestation organisée pour protester contre les brutalités policières et soutenir la révolution russe et à laquelle participèrent environ 500 manifestants. Le 7 octobre 1905 lors d’une perquisition à son domicile, au Pont de bois chemin de Fort Gentil, la police avait saisi la liste des adhérents de l’AIA dans le Var.
Lors de la grève générale des arsenaux militaires (14-16 novembre 1905) déclenchée pour défendre plusieurs ouvriers syndiqués et notamment Victor Pengam, il fut membre de la commission exécutive de grève et fut l’un des délégués qui alla à Paris s’entretenir avec le ministre, entrevue dont il fit le compte rendu devant une assemblée générale de près de 6.000 ouvriers.
Il devint administrateur de l’Union des chambres syndicales ouvrières du Var en 1907. Le 23 décembre 1907, il la représentait au défilé des ouvriers agricoles d’Hyères en grève. Le sous-préfet notait alors qu’il était un « antimilitariste de marque » et un « gréviculteur consommé ». Le 1er février 1908 il alla à Marseille faire une conférence pour le groupe Les Précurseurs où il avait notamment appelé à constituer une caisse « destinée en premier lieu à secourir les camarades désirant se soustraite aux obligations militaires et, en second lieu, à l’achat de brochures à distribuer aux militaires et aux conscrits en partance ». Le 12 novembre 1908 son domicile, 1 rue du Chemin de fer, fut l’objet d’une perquisition parallèle à celle du local du groupe La Jeunesse libre, 14 rue Nicolas Laugier, accusé par la police d’être une « agence de désertion ». Le 18 novembre, avec une vingtaine de compagnons — dont Escajolla et Poulian — il avait participé au concert-conférence de Charles D’avray qui avait réuni une centaine de personnes.
Busquère, qui était inscrit au Carnet B, aux élections législatives de 1910, fut candidat abstentionniste dans la circonscription de Draguignan contre le socialiste SFIO Fourment. Le Cri du Var, hebdomadaire de la Fédération SFIO, indiquait le 3 mai 1910 qu’il avait été exclu du syndicat des ouvriers de l’Arsenal maritime. Fin 1913-début 1914 il participa avec Antoine Bertrand et Lecca à des réunions publiques pour tenter de contrer l’influence au syndicat des ouvriers du port du socialiste réformiste Albert Lemarque.
Busquère passa à l’atelier des réparations en janvier 1917. Il faisait partie, en juillet 1919, du comité d’action des non-démobilisés. Avait-il été envoyé sous les drapeaux ?
Candidat à la commission administrative du syndicat, en août 1919, il ne fut pas élu. Gréviste les 6, 7 et 8 mai 1920, il subit vingt-quatre jours de retenue de salaire. Dès lors, il lutta dans le comité pour l’amnistie intégrale. On le vit dans de nombreuses réunions. Le 7 mars 1922, il devint secrétaire adjoint du syndicat CGTU. Le 17 mars 1922, il fut délégué comme titulaire à l’Union locale CGTU qui venait de se constituer. Il s’opposa dès lors à Flandrin qui préconisait d’entretenir des rapports avec le Parti communiste. Il quitta l’arsenal dès qu’il le put, en 1922, avec 302 mois d’ancienneté (minimum requis : 300) et prit sa retraite, le 9 juillet 1922. A la fin des années 1920 il était proche, semble-t-il, de Marius Escartefigue, ancien anarchiste devenu maire socialiste de Toulon.
Victor Busquère est décédé à Toulon le 15 octobre 1936.